Arts sonores, festivals a gogo et déserts au quotidien

Publié le 28 février 2011 par Desartsonnants

ARTS SONORES,

FESTIVALS A GOGO

ET DÉSERTS AU QUOTIDIEN !

En continuant ma veille internautique, je constatais dernièrement à quel point la chose sonore se cuisinait désormais à toutes les sauces.
L'essor du numérique aidant, couplé avec un intérêt croissant des galéristes et musées pour l'art sonore, donc avec le développement d'un marché de l'art spécifique, on voit aujourd'hui nombre de manifestations apportant généreusement le son aux oreilles d'un public prêt à en consommer jusqu'à ras les tympans. Pourquoi s'en plaindre me direz-vous, et se faire ainsi l'avocat du diable puisque Des Arts Sonnants lui aussi œuvre dans la médiation des arts sonores ?
Peut-être pourrait-on, dans un premier temps, être septique devant des programmations qui font feu de tout bois, le meilleur côtoyant parfois le pire, avec le numérique comme super-étendard médiatique.

Sans doute aussi peut-on épingler des événements qui se nomment festivals  dés lors qu'ils affichent une diffusion sur deux minuscules enceintes multimédia et quelques animations gentiment bricolées, et je n'exagère qu'à peine !

Mais rassurons-nous, ce foisonnement festivalier ne sévit pas que dans les arts sonores mais généralement dans l'ensemble des domaines artistiques, Chaque institution, association, région, département, ville, quartier, camping, s'enorgueillissant d'avoir SON propre festival. Ainsi, des plus grosses machines jusqu'aux plus plus modestes, les journaux d'été proposent des sélections festivalières de plus en plus copieuses, de quoi à ne plus savoir où donner de la tête, ou de l'oreille en l'occurrence. On trouve ainsi le festival du plus gros son, comme celui du plus petit, du son le plus abstrait, comme celui du plus descriptif, du son le plus provoquant, et du plus gentil, du son le plus commercial, comme du plus underground, du plus bricolé, du plus improvisé, du plus scientifique, gastronomique, littéraire, poétique, architectural, philosophique, humoristique, sonore...

Gageons que le temps fera son tri et que l'oreille des spectateurs-auditeurs se fera de plus en plus critique pour ne pas se transformer en entonnoir que des programmateurs un brin opportunistes gaveraient de sonorités tout-venant, plus assourdissantes qu'enrichissantes.
Mais d'autre part, que se passe t-il une fois que le festival a replié sa dernière guirlande sonore ? Que reste t-il sur le terrain quand le dernier artiste sera parti avec ses bandes-son, et machines bruissonnantes dans le coffre de son véhicule ?  Quelle continuité pourrait-on espérer pour que ne s'installe pas, entre deux éditions, si suite il y a, un grand vide plongeant nos oreilles dans un no sound land bien tristounet ? Pourquoi, à l'instar de moult festivals qui émergent ça et là, a t-on autant de peine à suivre, y compris dans de grandes métropoles qui se veulent également culturellement grandes, des programmations régulières et suivies au fil des saisons ? Pourquoi, si programmations régulières il y a, sont -elles si peu visibles et souvent fréquentées par une frange d'aficionados maîtrisant les circuits des friches underground urbaines et/ou des savantes institutions ? Pourquoi a t-on tant de mal à voir se constituer des réseaux qui rendraient un peu plus visibles, hors événements sporadiques,  toutes les excroissances sonores contemporaines ? Pourquoi l'artiste, le collectif, ont-ils tant de mal à trouver des lieux où diffuser, performer, installer ? Pourquoi n'existe t-il pas de lieux où l'on puisse écouter et/ou voir, selon les jours, des prises de sons audionaturalistes, fictions radiophoniques, pièces acousmatiques, vidéos sonores, installations... ? Pourquoi aucun lieu digne de ce nom, si ce n'est d'immenses navires multimédiatiques aux programmations aussi larges et déroutantes que leurs volumes bâtis, ne proposent des équipements techniques permettant à l'artiste comme à l'oreille du public d'y trouver son compte ?  Pourquoi en clair, miser autant sur une organisation axée sur de l'événementiel plutôt que sur une programmation régulière, des lieux d'accueil adaptés, et pour tout dire, un travail de fond au quotidien plus efficace à mon sens que des coups d'éclat médiatiques et ponctuels ?