Le 18 février 2011, Kamilla est venue trouver le Réseau Universités Sans Frontières. Mauricienne, celle-ci a obtenu un baccalauréat dans son pays en 2003 : arrivée en France chez sa tante, elle tente alors de s’inscrire en première année de droit à Nanterre en 2004. Depuis, année après année, l’administration, le bureau A09, lui refuse tout retrait de formulaire d’inscription « pour défaut de titre de séjour » au mépris total des règles en vigueur.
Six années. Six ans perdus, broyés par l’administration
Intermède en 2007 : sortant de leur silence, les agents du bureau A09 lui opposent l’obligation de produire un « dossier blanc », à remplir dans le pays d’origine. Décidant de repartir avec les économies accumulées ici en travaillant comme garde d’enfants et avec la peur de ne pouvoir revenir sur le territoire français, elle remplit le dossier, qui reste finalement sans réponse. Tout dossier transmis à l’administration devrait pourtant donner lieu à un refus ou une acceptation motivés. De retour en France, elle continue ses demandes à Nanterre. Jusqu’à aujourd’hui et même après l’arrêt des demandes de titres de séjour lors des inscriptions, théoriquement obtenu en 2010 (note de service du 19/07/2010 de C. Crowley), Kamilla se voit une nouvelle fois refuser tout formulaire. Les agents se paient le luxe, devant sa demande d’explication, de la remettre à sa place de façon vindicative. Après ces six années passées à tenter d’entrer dans le système universitaire, elle prend alors contact avec des associations de soutien qui la sortent de l’isolement malgré sa volonté d’abandonner et de rentrer dans son pays.
Où en est Kamilla aujourd’hui ?
Après deux entrevues avec le vice-président de l’université, Cornelius Crowley, et malgré la gravité des défaillances et fautes graves de son administration, on veut détourner le problème. On oppose désormais à Kamilla un diplôme de baccalauréat non équivalent pour empêcher son inscription accélérée en L1, l’obligeant à perdre une nouvelle année pour un diplôme d’équivalence au lieu de rééquilibrer le préjudice subi. Cette obligation d’équivalence, il fallait la lui proposer il y a six ans, elle l’aurait remplie avec assiduité.
Qu’est-ce qu’une question d’équivalence en comparaison de ces six années de vie détruites ? Kamilla, comme tous les étudiants sans papiers, doit avoir le droit d’essayer, et pourquoi pas, d’échouer.
Un cas caricatural peut-être, exemplaire certainement
Kamilla représente le paroxysme de ce que l’administration chiffrée des étrangers et l’aveuglement devant des cas humains peuvent offrir de pire. Parce qu’elle se fait dans le silence de bureaux soi-disant soumis à des règles strictes et opposables. Parce qu’elle s’impose à ceux qui, placés dans une situation de fragilité, d’infériorité, se font d’autant plus facilement broyer par les machines administratives qu’ils ont moins les moyens de se défendre.
Et pourtant, si les agents du bureau A09 sont responsables, sont-ils les seuls ? Comment comprendre que des agents continuent à demander des titres de séjour au mépris des règlements, des notes de service censément appliquées et surveillées par les hiérarchies qui en ont la charge ? Jusqu’à quand la présidence de l’université se défaussera-t-elle de sa responsabilité dans le sort réservé chaque jour aux étrangers ? Et nous, jusqu’à quand accepterons-nous les différences de traitement entre étudiants français et étrangers ? Jusqu’où laisserons-nous aller ce paternalisme teinté de zèle à l’égard des plus faibles, de ceux qui, comme Kamilla, n’osent pas se défendre autrement que dans les règles ? Que faire lorsque les règles qui, d’ordinaire, sont déjà rarement faites pour eux, ne leur sont même pas exposées ou refusées ?
A ces logiques administratives intolérables, à l’absence de réponses à la hauteur de la situation, aux fausses questions d’équivalence de diplômes jamais assez bons parce qu’ils viennent de pays étrangers, au rouleau compresseur administratif qui écrase des vies, nous décidons aujourd’hui avec Kamilla, avec vous, de dire NON.
Parce que nous pensons qu’à travers ce cas exemplaire, c’est tout un système de gestion des carrières universitaires qui a été trop loin. Parce que nous pensons qu’aux logiques racistes et chiffrées il est encore possible d’opposer des décisions humaines et responsables. Nous appelons tous ceux qui se soucient encore de l’humain, du lieu où ils étudient, où ils professent, où ils travaillent, à refuser cette situation.
Tant qu’une telle inégalité de droit (ne parlons même pas de fait) entre les étudiants existera, cette université méconnaîtra les principes fondamentaux sur lesquelles elle est censée s’être bâtie.
La liberté ôtée à un seul d’entre nous réduit à néant la liberté de tous les autres.
Puisqu’il s’agit de ne plus en rester aux seuls mots nous vous invitons à :
Signer la pétition pour l’inscription immédiate de Kamilla,
Et à venir exprimer votre indignation
Jeudi 3 mars à 11h, Hall du bât. DD
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RUSF, réseau universités sans frontières :