Extraits de l'interview de François Bayrou, publiée ce martin dans le Journal du Dimanche :
Quand les institutions sont mauvaises, quand les pratiques du pouvoir le sont aussi, les hommes, même de qualité, sont impuissants à éviter les dérives. Quand tout le monde sait qu’il faut aller prendre ses ordres directement au sommet, et entrer dans ses bonnes grâces pour progresser, quel est le poids des ministres et des hauts fonctionnaires? C’est l’Etat qui n’est plus ce qu’il était, c’est une certaine idée de l’Etat au-dessus des partis et des intérêts qu’il faut retrouver.
[Pour changer] d’abord, il faut retrouver des principes. Il faut que tout le monde sache que la France est réaliste, bien sûr, mais qu’elle défend des valeurs. Qu’elle sait écouter les démocrates menacés, entendre les peuples et pas seulement les régimes qui les oppriment. Qu’elle discute avec les pouvoirs en place, mais que partout dans le monde les amis de la liberté sont ses amis. Ceux qui luttent contre la corruption sont ses amis.
Ensuite il faut reconstruire chez nous un Etat digne de ce nom: que pour les nominations à tous les postes, ce soient la compétence et l’expérience qui comptent, et pas le copinage. Que les hauts fonctionnaires soient jugés en fonction de leur action et pas de leurs opinions. Cela passera par une authentique séparation des pouvoirs, un vrai Parlement, une justice respectée, des médias indépendants.
Enfin, il faut comprendre pourquoi toutes ces dérives n’ont pas pu être évitées. Les erreurs, les foucades sont le lot de tout pouvoir, mais toute dérive devrait trouver son garde-fou. C’est cela qui n’existe plus en France. Quand tout remonte au sommet, toute la diplomatie, tous les services de renseignement, le pays se paralyse. Quand un seul parti a tous les pouvoirs, il dérape forcément. C’est pourquoi il ne suffit pas de changer le parti au pouvoir, car les mêmes causes produiraient les mêmes effets.
Voici la révolution tranquille qu’il faudra imposer: cela ne coûtera pas un euro, ne lésera personne, et rendra à coup sûr à la France son image et sa fierté."