Les événements répondent à la règle d’unité de lieu – le manoir de King’s Bourne – d’unité de temps – une petite semaine – et d’unité d’action : le meurtre de l’arrogant Lucas Dale qui déclare, en ouverture du premier chapitre : « J’obtiens toujours ce que je veux ! »
Mais, comme toujours dans les romans anglais de cette époque – nous sommes en 1939 – une foule de personnages gravite autour de l’affreux assassinat : les nombreux domestiques et secrétaires de ce milliardaire américain à la fortune un peu trop rapide pour avoir été honnête, des jeunes filles pauvres dont l’une est la très belle Susan, au point d’avoir immédiatement fait naître l’amour fou dans l’esprit impérieux de Lucas Dale, plus un certain nombre de dames veuves aux cheveux gris et aux mains occupées à d’improbables tricots, l’ex-épouse de Lucas, théâtreuse au bout du rouleau, un américain mal embouché qui tente de faire rendre gorge à Lucas Dale...
Ici, il y a eu un coup de feu, mais personne ne semble l’avoir entendu, sauf ceux qui sont mis en cause, parce que la radio est jouée à plein volume et qu’un des habitants de la maison prend son bain chaque soir avant le dîner et que la plomberie fait un bruit d’enfer. C’est ce qui explique sans doute le titre anglais du roman « Who Pays the Piper ? »
Et aussi, comme toujours dans les romans de Patricia Wentworth, un couple d’amoureux plongés dans le malheur. Ici, c’est Bill, jeune architecte en attente de la première commande qui lui permettrait d’épouser Susan, mais qui est soupçonné du meurtre de celui qui lui a ravi sa fiancée à la suite d’un odieux chantage familial. Point n’est besoin d’expertises scientifiques, à part l’analyse des empreintes de mains mais aussi de chaussures, qui permettront de démasquer le coupable. On ne le dévoilera qu’à la toute fin, comme il se doit, et ce sera une surprise pour tout le monde, et un soulagement pour les tourtereaux.
* Patricia Wentworth, pseudonyme de Dora Amy Elles, est née en 1878 à Mussoorie (Inde). C'est à la suite d'un concours organisé par le Daily Mail, en 1923, que le public découvre les romans policiers de Patricia Wentworth, déjà connue pour ses ouvrages historiques. Cinq ans plus tard, elle crée un détective hors du commun : Miss Maud Silver. Prototype de l'armchair detective, Miss Silver, tout comme sa cadette Miss Marple (qui ne verra le jour qu'en 1930, sous la plume d'Agatha Christie), est une délicieuse vieille dame douée d'un don d'observation sans égal. Héroïne d'une trentaine d'intrigues, Miss Silver assurera dès lors la renommée de Patricia Wentworth, décédée en 1961. L'inspecteur Lamb, qui apparaît épisodiquement dans nombre de titres de la série « Miss Silver », est aussi le héros principal de trois romans, dont Meurtre à Craddock House.
Un pas de trop (Who Pays the Piper ?), publié à l’origine chez Hodder and Stougton (1940)- traduit en 2005 par Pascale Haas. 10/18 « Grands Détectives », 318 p. 7,50€.