Little Big Bang de Benny Barbash

Par Benard

deLeiloona

S'il fallait ranger ce récit dans une petite boîte, je le mettrais dans celle qui contient déjà Candidede Voltaire. Parce que, voyez-vous,Little Big Bangtient de l'apologue.
Derrière ce mot bien sérieux se cache une fable des plus délicieuses. 

Tout commence par une histoire de régime d'un père de famille enveloppé.

Papa débuta sa période d'amaigrissement par d'intenses recherches, pour déterminer quel régime serait le plus adapté à un novice en la matière. Il acheta un grand nombre de livres, tels queComment maigrir en mangeant de tout, dans lequel on vous explique que vous pouvez manger tout ce que vous voulez, autant que vous le souhaitez, mais uniquement entre dix heures du matin et midi. Le restant de la journée, vous devez jeûner, quitte à mourir de faim. L'auteur du livre s'engage personnellement à vous rembourser l'intégralité du prix de son livre, si, tout en suivant scrupuleusement ses instructions, vous ne perdez pas un kilo par semaine. Selon Papa, il n'y avait aucune chance que quiconque réclamât jamais son argent : en s'en tenant à ce programme, on mourrait dans d'inteses souffrances avant même d'avoir pu faire une réclamation. 

Après avoir essayé pléthore de fruits et légumes, et ce sans perdre un gramme, voici qu'il commence le régime tout “olives”. Mais l'essai se révèle lui aussi infructueux car au bout de quelques jours un noyau d'olive se coince dans sa gorge. Las de ces régimes, le pauvre homme reprend ses vieilles habitudes alimentaires.
Jusqu'à ce qu'un jour sorte de son oreille une branche d'olivier.  
Branle-bas de combat dans cette famille israélienne. Alors que l'épouse tente avec des ciseaux de couper cet intrus, le tout supervisé par une grand-mère qui a peur qu'on touche à son petit garçon déjà bien grand, le grand-père astrophysicien donne son avis d'homme scientifique sur ce fait extraordinaire.

Lorsque maman tenta de saisir la chose et de tirer dessus, papa laissa échapper un tel hurlement qu’elle lâcha prise aussitôt, effrayée. Ce fut peut-être, dans toute cette histoire étrange, sa plus grande erreur, comme nous l’expliquerait bientôt Abu Rudjum. Nous aurions pu encore déraciner cette chose, avant qu’elle ne se transforme en une colonie illégale que l’on ne peut plus déloger.

Bien sûr, parler de “colonie illégale” dans un roman israélien n'est pas du tout candide, tout comme l'olivier qui pousse dans l'oreille de notre pater familias. En effet, derrière cette fable décalée et fantaisiste, l'auteur soulève bon nombre de points d'actualité. Mais loin d'écrire un récit noir et pessimiste, l'auteur a pris le parti de nous faire sourire voire même parfois glousser.

Je pourrais aussi vous parler des piques pleines de tendresse que se lancent les deux parents, du regard naïf de leur garçon qui occupe la place du narrateur dans ce court récit, de ces références mythologiques complètement décalées quand la mère s'aperçoit avec horreur qu'un arbuste pousse dans l'oreille de son mari, de la description hyperbolique donc jubilatoire du peuple arabe quand la famille sous escorte entre dans un village arabe …

Benny Barbash signe là une fable drôle et peint à merveille une famille israélienne moderne avec ses desiderata. Nul doute que cet olivier, cette part étrange qui pousse et s'agrippe en territoire étranger, est avant tout là pour montrer qu'il faut accepter l'autre, aussi étranger et éloigné de nous soit-il.

Si je terminais cette chronique par une pirouette facile, j'écrirais que ce court récit a la saveur d'une olive à l'apéritif : vite mangée mais dont le goût épicé reste en bouche.

Little big bang
Auteur Benny Barbash
Editeur Zulma
Date de parution janvier 2011
Traduit par Dominique Rotermund
Collection Litterature
ISBN 2843045282
165 pages
17€50

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