Force est de constater que depuis l’accession de Nicolas Sarkozy à l’Elysée en 2007, la France ne connait pas la crise en matière de multiplicité de débats ! Faut-il s’en plaindre ? Certes pas, puisque l’on juge la vitalité d’une démocratie aux nombre de débats censés faire réfléchir une société sur ses propres évolutions.
Dans la perspective de l’élection présidentielle de 2012, le Chef de l’Etat entend livrer aux français les premières orientations de sa future campagne dans l’attente, bien entendu, de la confirmation de sa candidature.
Lors de l’émission « Paroles de Français » diffusée le 10 février sur TF1, Nicolas Sarkozy a évoqué la question de l’Islam dans notre pays. Dans le même temps, il a chargé l’UMP de mettre en place à compter du mois d’avril, une convention portant sur la place des religions en France. Au regard de ses propres déclarations et de celles portées par différents responsables de l’UMP, il n’y a aucun doute à avoir sur le fait que l’Islam sera, une fois de plus, au cœur d’un débat contrarié et contrasté.
Le Président du Conseil Français du Culte Musulman, Mohammed Moussaoui, approuve l’idée d’un débat permettant de se pencher sur l’exercice des cultes dans notre pays et la place des religions dans la République. Il craint toutefois, que celui-ci donne lieu à de nombreux dérapages « contrôlés » ou « volontairement incontrôlés » à l’image de celui mené sur l’identité nationale.
Je partage naturellement les craintes politiquement correctes de Mohammed Moussaoui, tout en sachant que cette convention de l’UMP et le débat qui en découlera donnera lieu à un déballage honteux et nauséabond dirigé contre nos compatriotes musulmans.
Le passage de Nicolas Sarkozy sur les erreurs commises en France au nom du multiculturalisme est une preuve évidente de cette mauvaise foi latente. Si Rachida Dati, ancienne Ministre de la Justice, appelle à ne pas « stigmatiser l’Islam » et que la Secrétaire d’Etat à la Jeunesse, Jeannette Bougrab, défend l’idée que « les français ne nourrissent aucune défiance vis-à-vis de l’Islam », les dents commencent à grincer même au sein de la majorité.
Aux bons, aux vrais, aux seuls français qui prétendent défendre les intérêts nationaux, il convient de rappeler le contenu de l’Article Premier de notre Constitution :
« La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée ».
C’est au nom de ces valeurs fondamentales, qu’il ne m’est plus possible de fermer les yeux et d’accepter la dérive sectaire de propos que certains entendent désormais ériger en uniques vérités.
Le Front National a défendu seul l’idée selon laquelle les musulmans représentaient un danger pour la France et pour la République. Malgré les discours fortement imprégnés de haine et d’intolérance face à la montée de ce péril, ni la République islamique et encore moins la Charia, ne se sont imposées en France !
Ces propos profondément anti-républicains ont été portés et relayés pendant près de 30 ans. Ils imbibent désormais toutes les couches de notre société. Prêtés très longtemps à la seule extrême-droite ces propos ont débordé sur la droite dite républicaine, et parfois même, et c’est encore plus stupéfiant, chez certaines personnes se réclamant de la gauche.
En France, il est hors de question de porter un préjudice moral ou physique sur les traditions des chrétiens ou des juifs. A l’inverse, avec les musulmans tous les droits sont permis !
On ne se refuse rien lorsqu’il s’agit de prétendre que l’Islam est porteuse d’une idéologie de haine et de violence. Lorsque l’on dresse des parallèles douteux entre délinquance et origines ethniques. Lorsque l’on compare des fidèles à des « occupants » quant ces derniers sont contraints à prier dans les rues par manque de lieux de culte qui leurs soient accessibles. Lorsque l’on se permet de vouloir intégrer des jeunes issus de l’immigration alors que ces derniers ne sont rien d’autre que des français comme les autres !
Comment peut-il en être autrement ? C’est vrai, le Président de la République lui-même avait appelé les musulmans de France à la « tolérance » lors du débat sur la Burqa et sur les minarets… C’est vrai, le Président de la République n’oublie jamais de souligner les « racines chrétiennes » et maintenant les « racines juives » de la France… Il omet dans le même temps -comme beaucoup d’autres- de dénoncer un Concordat d’Alsace-Moselle qui ne se justifie pourtant plus, et dans lequel l’Islam est toujours exclue.
Il n’est pas acceptable d’envisager une France où les citoyens sont catalogués, insultés et stigmatisés à longueur de journée ! Il n’est pas concevable qu’une République comme la nôtre s’abaisse à ôter des libertés et des droits à certains citoyens, lorsque ces mêmes libertés et ces mêmes droits sont reconnus à tous les autres !
Les responsables français du culte musulman reconnaissent eux-mêmes que rien n’est simple et que des adaptations sont nécessaires pour l’avènement d’un Islam de France. A la seule condition que l’on veuille bien se pencher sur cette question et sur aucune autre.
Pour toutes les raisons évoquées ci-dessus et car je crois à la force des valeurs portées par la République, il m’apparait indispensable que la France remercie ses compatriotes musulmans.
Oui la France que j’aime, la France à laquelle je crois, doit remercier ses compatriotes musulmans pour le sang-froid et la dignité dont ils font preuve face aux attaques répétées dont ils sont victimes !
A la manière d’Ernest Jaubert : « L'égalité entre les hommes est une règle qui ne compte que des exceptions ».