De retour sur Terre, les Magic Knights ne cessent de regretter le monde de Cephiro, et surtout le dénouement tragique de leur aventure… Alors qu’elles se retrouvent à la Tour de Tokyo, elles sont à nouveau, et inexplicablement, transportées sur Cephiro ; mais le monde de prodiges et d’enchantements est à présent une terre désolée et peuplée de monstres qui prolifèrent toujours plus. Le Maître Mage Clef leur explique que c’est l’absence même de Pilier qui a plongé Cephiro dans le chaos.
Mais il y a d’autres nouvelles alarmantes : trois mondes, Chizeta, Fahren, et Autozam, veulent conquérir Cephiro afin de dérober le système du Pilier pour leur propre compte… De plus, une entité maléfique mystérieuse appelée Debonnair clame être le nouveau Pilier de droit. Les Magic Knights doivent faire désespérément front contre tous ces ennemis tout en cherchant un nouveau Pilier qui rendra à Cephiro sa splendeur d’antan…
Si l’intrigue de cette seconde saison démarre en douceur, avec ce qu’il faut de flashbacks pour remettre en mémoire les événements de la première partie, les choses prennent peu à peu une tournure plus fouillée. Ainsi se mêlent des protagonistes déjà connus avec des nouveaux-venus qui, s’ils ne manquent pas de développer les relations entre personnages de manière plutôt convenue, n’en portent pas moins des symboles assez évidents dans une histoire qui déborde vite des frontières de l’heroic fantasy, traditionnel ou non, pour devenir un instantané de nombreux travers du Japon contemporain.
Autozam en particulier, monde où la technologie est un credo à la limite du sacré, exprime bien cette contradiction du Japon moderne étouffé par une industrialisation sans cesse croissante qui laisse toujours plus de côté les choses humaines, celles du cœur ; hors, Cephiro est bien un monde où « le cœur devient puissance » de sorte que la conquête de celui-ci par Autozam relève du simple processus de survie quand la science montre ses limites, toujours plus tragiques que ce que nos civilisations scientistes veulent bien nous le faire croire.
Pour Chizeta, c’est le besoin d’espace vital qui pousse ses princesses jumelles à envahir Cephiro, soit un autre problème récurrent du Japon, depuis des siècles, et dont les exigences l’ont maintes fois poussé dans une politique guerrière, à la fois en son sein mais aussi contre ses voisins, en conditionnant ainsi une grande partie de l’histoire de l’archipel mais aussi de ses remords – sans oublier ses rapports pour le moins encore conflictuels avec les autres grandes puissances économiques et politiques du Pacifique.
Quant à Fahren, c’est le désir qu’a sa jeune reine de demeurer belle et en bonne santé qui pousse ce monde à envahir Cephiro : on peut distinguer là une critique de la jeunesse japonaise actuelle plus préoccupée de frivolités que de ses responsabilités (1). Malgré une simplicité apparente des motivations de chacun de ces envahisseurs, on ne trouve là aucun réel manichéisme simpliste comme on en voit trop souvent dans ces récits de fantasy qui privilégient le spectaculaire et le grandiose au détriment de la trame.
Même le mystérieux et inquiétant personnage de Debonnair reflète une pertinence rare, car s’il s’agit d’une entité purement maléfique elle reste surtout le produit du désespoir des habitants de Cephiro devant l’écroulement progressif de leur monde : si mal incarné il y a, c’est parce-que le cœur accablé des survivants l’a créé à partir de la magie même de cette terre unique. On voit bien peu souvent une telle « logique », ici imparable, dans une histoire pourtant d’inspiration merveilleuse et fantastique, et donc par définition illogique et irrationnelle : les auteurs nous entrainent ici avec brio aux confins de leur propre univers tout en continuant de nous surprendre, de nous émerveiller. Quant au laquais principal de Debonnair, la non moins mystérieuse Nova, ses origines obscures reflètent le même sortilège en se basant sur un développement exemplaire de la première partie de l’histoire qui ne laissera pas indifférent…
Malgré quelques longueurs somme toute assez sporadiques et un dénouement en partie convenu mais à la charge émotionnelle forte, cette seconde saison mérite elle aussi largement d’être vue – surtout si, comme moi, vous êtes tombés sous le charme de la première.
(1) si cette problématique n’est pas exclusive au Japon, elle y apparaît certainement plus douloureuse que dans les autres nations démocratiques et industrialisées car ces révolutions tant politiques que technologiques sont apparues dans l’archipel à la fois plus récemment et plus brutalement, en y laissant ainsi des cicatrices plus profondes. ↩
Notes :
La série compte un total de 49 épisodes diffusés au Japon presque en continue mais en deux parties, ou saisons, séparées par un délai d’à peine quatre semaines ; la première – diffusée du 17 octobre 1994 au 13 mars 1995 – reprend la trame des tomes un à trois du manga original, alors que la seconde – diffusée du 10 avril 1995 au 27 novembre 1995 – narre les événements des volumes quatre à six.
Le doublage du dernier épisode arracha des larmes à tous les comédiens qui prêtaient leurs voix aux différents personnages de la production.
Magic Knight Rayearth, Toshihiro Hirano, 1995
IDP Home Video, 2006
29 épisodes, env. 21 € l’intégrale collector
Cette chronique fut à l’origine publiée sur le site Animeka