“Halal police d’état” de Rachid Dhibou

Publié le 22 février 2011 par Boustoune

Chalut les humains,

Avant, j’aimais bien les sketches d’Eric & Ramzy, qui commençaient toujours par un jeu de mot de classe féline :
”- Nous allons découvrir un mot… Ce mot nous ne le connaissons ni vous ni nous…
- gnangnangnan, le petit chat le petit ninou…”

Oui, bon, ça vole pas haut. Mais j’étais jeune. Il y a prescription…
Donc j’aimais bien les jeux de mots du duo sur scène ou à la télé. Mais après, j’ai découvert leurs oeuvres cinématographiques et là, ça s’est gâté. Hormis l’OFNI Steak, de Quentin Dupieux, les deux humoristes ont cumulé les navets : La Tour Montparnasse infernale, parodie de film catastrophe (et film catastrophique), Double zéros (comme la note que j’aurais attribué au film), Les Dalton (Mon Dieu, Morris doit se retourner dans sa tombe devant autant de bêtise)…

Bref, pas de quoi inciter à aller voir cet Halal, police d’état, leur nouveau film…
Mais bon, le film s’inspire d’une série de vieux films comique très populaire en Algérie (la série des Inspecteur Tahar) et des journaux très respectables comme Le Monde, Libé ou Télérama ont aimé. Donc je me suis laissé tenter, pensant voir une parodie décalée façon OSS 117, potentiellement culte.

Aïe! Dès les premières images ça sent le pâté pur porc.
Une diplomate algérienne , saisie  d’un petit creux (comme le film…), fait un saut dans une épicerie de Barbès et hésite entre un saucisson halal et un saucisson halouf. Elle se fait trucider par un tueur masqué. Punition divine ?  Non, elle s’est juste retrouvée sur le chemin d’un serial killer s’attaquant à tous les épiciers arabes du quartier.
Le gouvernement algérien prend l’affaire au sérieux et dépêche sur place son meilleur enquêteur, Neh-Neh (Ramzy, affublé d’une grosse moustache façon Groucho Marx et d’un accent de blédard ), choisi selon les techniques ancestrales (Booder déguisé en Carabosse de la Casbah). Le flic n’a pas d’autre choix que d’accepter cette mission mais il exige d’emmener avec lui son collègue le Kabyle (Eric, affublé d’une mèche de cheveux bizarre), un ex-expert de la police scientifique ayant tout plaqué suite à une rencontre du troisième type l’ayant doté d’un accent typiquement français (la honte!).
Le duo découvre la fameuse “hospitalité française” (fouilles répétées, contrôles de police,…) et se met à enquêter avec des méthodes très particulières, axées autour des déductions par l’absurde.

Et c’est parti pour environ quatre-vingt dix minutes de plaisanteries potaches et de délires privés tournant autour des clichés communautaires, de jeux de mots exploitant les spécificités linguistiques de l’arabe, du français et de l’anglais ( la marque de fabrique des humoristes).
Le résultat est, comment dire…
…Subtil? Euh, non. Certainement pas ! Tout est lourd et inutilement appuyé. Les approximations verbales d’Eric & Ramzy font sourire au début, puis lassent très vite les spectateurs. Les gags, basiques, ne font pas toujours dans la dentelle.
…Drôle? Non plus… Du moins pas suffisamment au vu des intentions affichées du duo. Le film ne déclenche même pas la franche hilarité au sein de son public-cible.
Non, le terme adéquat serait plutôt “débile (et je reste poli). Ou “puéril” tant les deux compères ont l’air de grands gamins surexcités.
D’ailleurs, on serait même tentés de penser que le film s’adresse principalement aux enfants, avec son message moral simpliste et son burlesque basique. Mais les références du duo (les clins d’oeil au cinéma de Luc Besson, producteur du film, via Europacorp, les hommages à Psychose ou au Da Vinci code…) s’adressent plus volontiers à un public adulte.

Bref, le film part dans tous les sens avec la même constance dans la médiocrité, sauf à de rares occasions où le film atteint des sommets… de nullité.
C’est tellement hallucinant de bêtise qu’on se demande, justement, si on n’hallucine pas : un asiatique laisse entrevoir une main poilue comme une mygale, Ramzy atomise les chiottes d’un restau après avoir mangé un petit pain suédois (quelle finesse!), et last but not least un ET ressemblant à un mix crapaud/minimoy vient donner des leçons de morale aux humains, genre “on est tous frères, le racisme c’est pas bien”. Une morale également déclinée, à la fin,  sur le mode de la comédie musicale (rien ne nous sera épargné).

Oh bien sûr, la démarche est louable, sur le papier, mais le résultat est tellement affligeant que la communauté maghrébine aurait le droit de se sentir offensée de cet accumulation de clichés faciles, d’autant qu’ils sont exploités très mollement et qu’ils ne sont pas vraiment remis en question. Ca craint du boudin.

Allez, je ne vais pas disserter pendant des heures sur un tel objet filmique. Ce n’est pas bon, un point c’est tout.
Mieux vaut revoir, sur la même trame, Le Téléphone sonne toujours deux fois de Jean-Pierre Vergne, avec Les Inconnus. Ce n’était pas un chef d’oeuvre, mais c’était déjà plus amusant que cet Halal police d’état.
De toute façon, la couleur est annoncée dès le départ, juste avec le nom du personnage principal : Ca s’écrit Nerh-Nerh, mais ça se prononce Nanar…

Bon, il faut que je vous laisse, je vais me faire les griffes sur Télérama (ou Le Monde ou Libé ou Les Inrocks… ah non, çui là est déchiqueté depuis longtemps…). Franchement, je ne me fierai plus à leurs avis. Ils ne sont plus crédibles, les mecs.

Pleins de ronrons,

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Halal police d’état
Halal police d’état

Réalisateur : Rachid Dhibou
Avec : Ramzy Bedia, Eric Judor, Anca Radici, Jean-Baptiste Shelmerdine, Frédéric Chau, Lannick Gautry
Origine : France
Genre : parodie lourdingue
Durée : 1h38
Date de sortie France : 17/02/2011
Note pour ce film : ○○○○

contrepoint critique chez :  Libération

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