Samedi soir, petite coupe de champagne dans un bar. A côté de moi, un groupe d’ado qui compte sa monnaie pour se payer laborieusement un verre. Ca me fascine les ados, vraiment. Il faut dire que j’ai rarement l’occasion d’en côtoyer de près. Sur terre donc, il y a trois clans, les hommes, les femmes et les ados. Premier constat : les mecs ont tous la coupe à la Justin Bieber, une sorte de coiffé-décoiffé-cheveux rabattus. Un truc un peu moche mais ultra-pratique pour dissimuler les boutons d’acné. Les filles sont toutes des franges sur pattes, ou plutôt sur slim. Je me demande comment ils arrivent à se reconnaitre entre eux : « Salut Isidore, ah excuse moi Barnabé, j’tavais pas reconnue », « c’est pas grave Violette », « non non, moi c’est Camélia ». Car autre constat, l’ado porte un prénom canon. A mon époque on s’appelait tous Valérie, Stéphanie, Xavier et Laurent. Au mieux Marine. J’ai toujours rêvé de m’appeler Marine. Maintenant ils s’appellent Joseph, Côme ou Marceau. Ca a de la gueule. Mais même si le prénom est canon, l’ado lui, est toujours un ado comme nous l’avons tous été : un être hybride, toujours coincé entre deux mondes. Au choix, un esprit d’enfant dans un corps de grand, ou un esprit adulte dans un corps d’enfant. Je ne sais pas ce qui est le pire. A un moment, cependant, l’adolescent fusionne avec lui-même et devient l’adolescent dans toute sa splendeur, une sorte d’adolescent parfait. Ca peut arriver à 16 ans et 2 mois ou à 15 ans et 6 mois, c’est très personnel. Moi je pense que j’ai atteint ma maturité d’adolescente à 16 ans et 4 mois. Je m’en souviens c’est le jour où on a posé mon appareil dentaire, que j’ai eu la plus grosse poussée d’acné de toute ma vie, et que je me suis engueulée avec mes parents en claquant bien fort la porte de ma chambre, et en jurant de faire une fugue. Au final le lendemain je suis allée au collège, mes lunettes dans une poche, mon appareil dentaire dans l’autre et mon acné toujours bien ancré sur mon front. L’acné c’est pas comme les lunettes, c’est pas amovible. Sale période l’adolescence mais aussi la période la plus magique qu’y soit. On se bourre la gueule au Passoa mais on s’endort dans des draps Tintin. On roule des galoches monstrueuses et on se régale avec le gratin de macaronis de maman. Enfin j’espère que c’est toujours comme ça. Je suis certainement d’une naïveté confondante. Mais je persiste à penser qu’un adolescent est toujours un adolescent. Qu’il ait grandit avec Indochine dans les années 80 ou avec Muse en 2011. Suis juste pas pressée que ma fille y passe. Je l’entends déjà « mais tu comprends rien maman, t’es complètement à côté de la plaque ». Non, suis pas pressée.