Le metteur en scène Benoit Lavigne nous promet un spectacle « diabolique et haletant »… Pour notre part, nous parlerons davantage d’un climat, remarquablement rendu, pourtant extrêmement difficile à restituer sur une scène de théâtre (il l’est en fait rarement), celui des polars américains, noirs et glauques à souhait.
Car pour ce qui est du côté haletant, la pièce étant construite sur un principe de flashs back et commençant quasiment par la fin, nous repasserons… Quant au côté diabolique, je le cherche encore.
Le texte de Keith Huff nous expose la « descente aux enfers » de deux flics de Chicago, narrée par leurs soins. Nous ne rentrerons pas dans les détails, Alcool, drogue, crimes sordides, prostitution, ripoux… Le scénario est efficace, bien que des plus classiques, mais effleure trop ce qu’il évoque. Contrairement à ce que semble penser Benoit Lavigne, personnages, situations, dialogues me paraissent un peu courts, souvent déjà vus, et l’on reste dans quelque chose de factuel qui manque de chair, d’humain, de psychologie, et peine à embarquer le spectateur. On ne risque d’ailleurs pas grand chose en affirmant que si la pièce fit un carton l’an passé aux States, c’est probablement moins à cause de sa force dramatique que de la popularité de ses interprètes, j’ai nommé Daniel Craig et Hugh Jackman…
Ceci étant posé, tirons notre chapeau à l’équipe artistique française. Appuyé par une scénographie des plus réussies, superbement éclairé, le travail de Benoît Lavigne est proche de la perfection, original, soigné, ciselé. Sa direction d’acteur est excellente. Olivier Marchal et Bruno Wolkowitch s’effacent derrière ces deux flics qui n’ont rien des héros ou bellâtres qu’ils ont pu jouer jusqu’à présent. Rugueux à souhait, ils parlent avec leur tripes et compensent habilement le manque d’intensité du texte.
Un spectacle qu’il ne sera pas inutile de découvrir, si vous en avez le temps. La « Pluie d’enfer » n’est peut-être pas d’enfer, mais ne tire pas non plus du côté du crachin breton…