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6 Questions à… Stéphane Rose

Publié le 21 février 2011 par Lagrandedepression

Stéphane Rose est un journaliste à supports multiples : la presse papier, la presse people, le web, et la télévision. En 2010, il a sorti deux livres, un roman « Pourvu qu’elles soient rousses », et un essai « Défense du poil, contre la dictature de l’épilation », une ode au tablier de forgeron. Stéphane est également un des auteurs des fameux Gérard, le pendant français des Razzie Awards, où l’on récompense enfin la médiocrité télé et ciné. D’ailleurs, ce soir, c’est la cérémonie des Gérard du Cinéma sur Paris Première, et l’on pourra ainsi connaître le meilleur « désespoir » féminin 2011… Entre deux répétitions de cet événement, Stéphane Rose a soigneusement répondu au questionnaire de la Grande Dépression. Nous l’en remercions.

6 Questions à… Stéphane Rose

Stéphane Rose, Poil à Gratter

Le morceau où vous aimez noyer votre chagrin ?
Ce sera le plus souvent un morceau d’ambient, un truc sans rythme ni réelles mélodies, à base de nappes éthérées et un peu cradingues. Des artistes du genre Tim Hecker, Fennesz, Nest, Jacaszek… S’il faut choisir un morceau je dirais “Transit”, de Fennesz, sur l’album “Venice”. Avec la voix de David Sylvian. Du concentré de désespoir. Pour un chagrin plus modéré, je tolère quelques rythmes, mais reste obligatoirement dans l’electro ambient. “Nanni nanna”, de Lulu Rouge, par exemple.

David Sylvian - Transit

Lulu Rouge - Nanni nanna

La dernière fois que vous avez pleuré ?
La semaine dernière, j’ai pleuré de rire avec mes copains des Gérard, comme souvent quand on improvise nos conneries. La dernière fois que j’ai pleuré pas de rire, c’était bien évidemment pour une meuf, il y a deux ans. Ma dernière histoire passionnelle. Dernière dans tous les sens du terme: désormais je suis bien résolu à ne plus pleurer que de rire. Ou alors, éventuellement, de conjonctivite.

La déprime est-elle source de création ?
Oui, mais de création merdique. Les écrits dépressifs ne restent jamais, on les jette à la poubelle dès qu’on a recouvré un minimum de lucidité, ou alors c’est qu’on en a aucune, et il faut donc arrêter de créer. Je considère la création comme un artisanat, qui demande patience, disponibilité, énergie, amour du travail bien fait. Autant de qualités que n’ont pas les dépressifs. Sans compter qu’il est de notoriété public qu’ils bandent mou et baisent mal, et j’aime trop la bagatelle pour m’autoriser un tel sacrifice.

Votre artiste dépressif(ve) préferé(e)?
Les artistes dépressifs m’emmerdent, sauf dans la musique. Par le biais du son je suis réceptif à la dépression esthétisée des autres. J’adore tous les groupes expérimentaux nihilistes et drogués post eighties du genre Coil, Current 93, Death in June… Je vais jouer le jeu et ne retenir que deux morceaux. “Killing game” de Skinny Puppy (sur l’album “Last Rights”) et “Cold cell” de Coil (sur je ne sais plus quel maxi). Dans le genre “artiste dépressif”, vous aurez du mal à trouver mieux (ou pire, c’est une question de point de vue).

Skinny Puppy - Killing Game

Un film qui vous file le bourdon à chaque fois ?
Je ne regarde les films qu’une fois. Donc un film ne me file le bourdon qu’une fois. Le dernier en date est certainement l’exemple le plus criant: “Les noces rebelles”, de Sam Mendes. Mais c’est un bourdon positif, car ce film, par le message hautement pédagogique qu’il dissimule, est finalement très positif.

La chanson ou l’artiste qui est un phare pour vous en cas de déprime ?
Ça ne peut pas être un morceau totalement joyeux ou entrainant, le contraste avec la déprime serait trop fort. C’est donc un morceau dont la mélodie est mélancolique, mais porté par un rythme et une énergie qui vous disent: “lève toi et marche”. J’en ai découvert un récemment qui remplit cette fonction à merveille, c’est le morceau “Isla”, sur l’album éponyme de Portico Quartet. La mélodie est triste au possible, mais l’association d’une contrebasse bonhomme et joufflue et d’une batterie nerveuse et précise font de ce morceau une locomotive derrière laquelle on ne peut que s’accrocher. Mais mon exemple ultime du morceau phare, c’est “Starless”, de King Crimson, sur l’album “Red”, c’est-à-dire dans sa version de 12 minutes (et pas l’idiote version mutilée qu’on trouve dans certaines compilations indignes). C’est un morceau en deux parties : cinq minutes de ballade dépressive d’amoureux transi, et le reste en furie jazz-rock-noise progressive menant à une apothéose qu’on sent très tôt venir de façon inévitable, mais qu’on se prend quand même bien profond en se disant “oh la vache”. Et ça marche à chaque fois, hein. J’ai découvert ce morceau à 20 ans, j’en ai 38, il ne m’a pas fait défaut une seule fois. Et en vous disant ça je ne peux pas faire autrement que de me fendre d’une spéciale dédicace à mon camarade Benjamin Fau.

King Crimson – Starless (dans la version non-mutilée)

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