Vous aurez peut-être entendu la nouvelle de la condamnation de la compagnie Chevron par un tribunal équatorien suite à un litige environnemental qui dure depuis plus de 17 ans. Texaco, maintenant propriété de Chevron, déversait alors les déchets toxiques de ses forages équatoriens dans la forêt amazonienne. On ne parle pas ici de petits déversements ou de déversement accidentel, mais bien d'une pratique courante; On estime que Texaco a déversé 18 milliards de gallons de résidus et de boues toxiques sans aucun traitement préalable, en Amazonie.

Évidemment, la compagnie a déjà annoncé qu'elle n'entendait ni respecter le jugement de la cour, ni se soumettre à la sentence; une amende de 9,5 milliards de dollars. Et si Chevron a déclaré qu'elle irait en appel, la poursuite en appellera également de la sentence, réclamant plutôt des dommages de 27 milliards, soit le coût minimal du nettoyage estimé du fiasco Texaco (et on estime le coût total environnemental à 40 milliards).
Si vous voulez en savoir plus sur cette histoire, il existe un site d'information sur la campagne pour la justice en Équateur qui s'intitule très justement Chevron Toxico.

Poussant le cynisme assez loin, la page web de Chevron affiche le slogan: "Finding newer, cleaner ways to power the world".
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Yes Men et autres activistes
Les Yes Men sont un duo d'activistes qui oeuvre en organisant des canulars ambitieux. Ils personnifient souvent des porte paroles d'entreprises ou organisations qu'ils ciblent. Par exemple, à Copenhague en 2009, ils ont lancé une fausse campagne d'Environnement Canada signifiant que le Canada allait adopter des normes strictes en matière de réduction de gaz à effet de serre. Faux sites internet, faux communiqués de presse, fausses réactions internationales, les Yes Men sont bien organisés.

Vous avez peut-être entendu parler des Yes Men par d'autres de leurs canulars, ou bien par un de leurs deux films documentant certaines de ces farces politiques (Dow Chemicals, Haliburton, Exxon...).

Si je vous parle des Yes Men, c'est que Chevron est devenue leur plus récente cible. Comme la compagnie réagissait à sa condamnation en Équateur par un investissement massif dans une campagne pour redorer son image (dont le slogan est "We Agree, do you?"), les Yes Men ont décidé de les "appuyer" en lançant leur propre campagne de publicité Chevron.
D'ailleurs, la plupart des affiches qui sont reproduites dans ce billet proviennent de leur banque d'affiches publicitaires de Chevron, qu'ils vous invitent à utiliser, reproduire, imprimer, distribuer, et apposer un peu partout.

(Parenthèse canadienne)
Au Canada, Chevron opère deux sites distincts dans les sables bitumineux en Alberta. Des communautés d'Alberta, de Colombie Britannique, de Saskatchewan et des Territoires du Nord Ouest s'opposent constamment aux nouveaux développements et à l'expansion des sites déjà exploités. Sur le site True Cost of Chevron, un des chefs amérindiens mentionne que "We have to slow down industry to let us catch up. ... If we continue to let industry and government behave the way they've been behaving the last 40 years, there will be no turnback because it will be the total destruction of the land." (Preuve que ce ne sont pas tous les résidents des prairies qui sont en faveur de cette exploitation sauvage et déréglementée favorisée par le gouvernement Conservateur).
Les détails de l'impact de ces sites - et de tous les autres sites exploités par Chevron - sont disponibles dans des rapport annuels alternatifs de Chevron préparés par le site et disponibles en ligne.
Au Canada, ne cherchez pas les stations de Chevron (ou les stations d'essence Texaco), car Texaco Canada a été vendue en 1989 à Imperial Oil et ses stations sont devenues des stations Esso.

Pour revenir au dossier équatorien, dont le désastre environnemental s'est étendu entre 1972 et 1993, un article publié sur le site de l'organisme Oil Watchdog rappelle que si Chevron avait réglé ce dossier en payant les sommes demandées, l'entreprise aurait payé moins cher que ce qu'elle a encourue au fil des ans en frais juridiques et en contre-promotions (incluant un documentaire commandité en sa faveur pour contrer l'effet d'un reportage de l'émission 60 Minutes). L'organisme a également publié une fausse publicité (ci contre) pour dénoncer l'attitude de Chevron.
Aux États-Unis, Condoleezza Rice était une des membres du conseil d'administration de Chevron et en charge du comité sur les politiques publiques de la compagnie, avant de devenir principale conseillère sur la sécurité nationale, puis secrétaire d'état de George W. Bush. Pour l'honorer, Chevron avait d'ailleurs nommé un de ses pétrolier en son nom, mais a du se raviser suite à la controverse ainsi crée.
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