Si le G20, sur le plan économique ou politique, n’apporte généralement rien de très concret et se contente la plupart du temps d’une fumée rose et diaphane, il donne cependant l’occasion de mesurer les forces en présence. Et, alors que cette édition est sous présidence française, le constat qu’on peut déjà tirer ne fera pas plaisir à tous ceux qui sont persuadés de l’immense rôle de la France dans le monde.
En effet, c’est sans ambiguïté.
L’idée de ce G20 était d’aboutir à une série d’indicateurs permettant aux différents pays de s’étalonner et donc de mener des politiques économiques efficaces pour assurer une certaine croissance. Sarkozy, comme à son habitude, s’est imaginé pouvoir jouer un rôle d’importance en réclamant à tous que les négociations portant sur ces critères soient courtoises mais brèves. Surtout brèves, d’ailleurs :
« Je souhaite éviter que vos débats ne s’enlisent dans des discussions interminables sur ces indicateurs »
Les hôtes réunis à l’Elysée, après un dodelinement de la tête poli, ont bien vite oublié le babillage médiatique inconséquent du président français et ont ensuite passé l’intégralité de la réunion à s’écharper sur ces fameux indicateurs. Et quant aux autres sujets (réglementations sur les matières premières agricoles, par exemple), s’ils ont été abordés, les discussions n’ont débouché sur absolument rien de concret.
De vagues indicateurs, pas encore interprétables et non contraignants d’un côté, et de l’autre rien de concret : tout va bien, le G20 (G vain ?) est un franc succès, comme d’habitude.
Ce qui ressort surtout, c’est la position de la Chine : à elle seule, elle a, clairement, fait comprendre qu’elle ne se ferait pas dicter sa politique économique, par personne, Américains compris.
Ce qui est logique, du reste : après tout, ce sont eux qui produisent les denrées que nous consommons à crédit, et ce sont aussi eux qui laissent courir notre endettement. Et à l’aune de cette donnée nouvelle où la Chine n’entend plus seulement compter parmi les grands pays, mais se placer directement comme arbitre, on comprend tout de suite mieux pourquoi l’idée d’un nouvel étalon-or commence à apparaître dans l’Empire du Milieu.
Et, à bien y réfléchir, c’est parfaitement logique : lorsqu’on détient des milliers de milliards de dollars en réserve, qu’on voit la dette américaine grossir comme un goret engraissé aux petits rectangles de papier marqués « dollar », qu’on est, en même temps, le plus gros producteur mondial d’or, … on peut être violemment tenté de convertir ces dollars en or, tranquillement, doucement, sans bruit.
Symétriquement, on comprendra aussi pourquoi, dans la plupart des pays occidentaux, endettés jusqu’au cou, le retour à l’or sera considéré comme une hérésie ; en regard, on peut même interpréter au moins en partie funestement la volonté de certains états américains d’obliger les acheteurs ou vendeurs d’or au-delà de 100$ à fournir toute une batterie de données personnelles : quelle meilleure méthode pour décourager ceux qui veulent assurer leurs arrières avec des denrées physiques ?
De même, on pourra se demander ce que cache le refus obstiné des autorités américaines d’auditer les réserves d’or, alors que tout le monde se pose la question, depuis 1953, de savoir si les 8000 tonnes d’or qui y sont officiellement entreposées y sont toujours.
Je résume donc :
- La Chine a, lors de ce G20, très clairement marqué son territoire en faisant copieusement pipi sur les velléités de Sarkozy de mener la réunion selon son propre agenda. Personne n’a moufté.
- Dans le même temps, elle gobe, discrètement mais à rythme soutenu, des tonnes d’or et d’argent.
- Tous les pays annoncent des taux d’inflation en hausse.
- La principale réserve d’or du monde est, pour autant qu’on puisse en juger, purement virtuelle.
Tiens, à ce tableau, on pourra … non, on devra ajouter, découverte ô combien prévisible, que des millions d’Anglais se sont fait flouer par leur gouvernement de milliard de livres sur leurs retraites en pipeautant sur le taux d’inflation : les pensions étant ajustées sur ce taux, des millions de retraités anglais se rendent à présent compte que leurs difficultés de plus en plus importantes à boucler les fins de mois tient pour beaucoup à l’écart entre ce qu’ils touchent et ce qu’ils auraient dû toucher si l’Etat faisait son travail correctement.
Tous ceux qui, comme moi, n’ont jamais rien attendu de bon de l’Etat, ne pourront que se trouver renforcés dans leur sentiment ; non seulement, la spoliation éhontée des richesses d’un pays par l’inflation est savamment entretenue par les clowns à roulette qui nous gouvernent, mais en plus, lorsqu’en retour du pouvoir qu’on leur donne, on s’attendrait à ce qu’ils fassent à peu près leur travail correctement, on se rend compte qu’ils font n’importe quoi.
Toutes les pièces se mettent, lentement mais sûrement en place : les gigantesques montagnes de dettes ne pourront pas réellement être remboursées, et il faudra donc une inflation galopante.
Pour s’en protéger, ceux qui savent, ceux qui se doutent, convertissent actuellement leurs devises en biens matériels. A ce rythme, un petit matin, la Chine pourra nous expliquer, après avoir racheté, patiemment, toutes les réserves d’or disponibles sur le marché, que « all your gold are belong to us« .
Et ceux qui ne peuvent pas s’en protéger, ceux qui, moutontribuables tendres et naïfs, croient encore dans leurs gouvernants, dans la puissance de leur état, se retrouveront lessivés : ce seront, comme d’habitude, les pauvres et les faibles qui paieront, et subiront de plein fouet cette inflation.
For great justice ?