A la lecture d'Hiver Arctique, j'avais été impressionné par la maîtrise du récit dont faisait preuve Arnaldur Indridason, épaté par sa manière de combiner la forme et le fond, de révéler les problèmes identitaires de la société islandaise. Avec Hypothermie, maîtrise et efficacité sont toujours là, et j'ai pour ma part été une nouvelle fois impressionné par ce travail d'orfèvre. D'autant que l'auteur part de rien, d'une situation dont on se demande bien comment il va tenir sur la longueur: il n'y a pas de meurtre et le suicide de Maria est évident. La perplexité est de mise. Est-il seulement possible d'écrire un polar quand une enquête paraît aussitôt étouffée dans l'oeuf ?
Mais voilà, c'est plus fort que lui, le commissaire Erlendur, avec l'empathie qui le caractérise, se demande ce qui a pu pousser Maria à se suicider, quel profond désespoir a pu l'y contraindre. La période étant assez calme en terme d'enquêtes, il replonge aussi dans d'anciennes affaires de disparition avant que les dossiers ne soient définitivement clos. A mesure qu'il progresse, qu'il interroge, que les pièces des différents puzzles s'assemblent, Erlendur trouve comme un écho à la disparition de son frère et donc, à sa douleur personnelle. Et au lecteur d'être pris !
Cette immersion est remarquablement restituée dans la version sonore d'Hypothermie. Jean-Marc Delhausse a su trouver une voix clairement identifiable pour chacun des personnages qui ponctuent ce roman, en jouant seulement de légères inflexions. Mais ceci, je ne l'ai analysé qu'après. Pendant, je baignais dans les eaux sombres, glaçantes et inquiétantes de l'imagination d'Arnaldur Indridason.
Hypothermie, Arnaldur Indridason, traduit de l'islandais par Eric Boury, Audiolib, 9 h