Emergence futuriste et fruit de l'émancipation artistique du jeune homme issu de Portland, Ramona Falls sonne d'entrée comme une réminiscence partielle du groupe, non moins
futuriste, Menomena, avec lequel Knopf officie depuis plus de 7 ans (et bientôt sur ces pages). Il n'y donc rien de vraiment surprenant à pouvoir palper cette filiation, à se
sentir aussi bien en sa compagnie, d'autant que Brent y a mis sur la table tout son coeur et toutes ses tripes pour y exprimer des émotions qu'il lui était parfois difficile de faire partager au
sein de Menomena.
5 mois de travail acharnés seront nécessaires à la production de ce flot d'effervescence maîtrisé, ainsi qu'un boulot monstre de studio pour reprendre les boucles séquencées et retravailler les
bandes des quelques 35 musiciens qui sont venus prêter main forte à ce cerveau insatiable et "illuminé". Et le résultat est à la mesure de nos espérances (du moins des miennes), car il n'y a
finalement pas grand chose à redire sur ce disque (vous jugerez vous même). Intemporel et très intelligemment mené, "Intuit" est une sorte de condensé quasi idéal représentant à lui seul une
partie non négligeable de toute la mémoire indie rock américaine. Tout y est jeté avec une parcimonie déroutante et un regain de sensibilité accrue poussant naturellement au respect de l'oeuvre,
qu'on l'aime ou qu'on la rejette. Non seulement l'imbrication de tous ses éléments est parfaite tout en étant relativement unique (pour le moins très rapidement identifiable), mais en plus il n'y
a pas l'extrémisme que l'on retrouve dans certains groupes qui poussent sans arrêt l'élitisme à un degré de sauvagerie tel qu'ils sont presque les seuls à en comprendre le but (je reconnais
ceci-dit qu'il en faut pour tout les goût). Le but de Ramona Falls est d'abord de vous divertir dans la légèreté, pas de vous plomber le cerveau pour y fouiller à l'intérieur.
Place donc aux mélodies chaudes et aux vagabondages bucoliques et enivrants (ça c'est pour dire que vous pouvez y aller les yeux fermés).
Même si Bent Knopt assure qu'il est quelqu'un de très introverti et qu'il a mis dans ce disque beaucoup d'élements contrastés relatifs à son histoire personnelle, le but était
d'abord de pousser à l'interaction de nombreuses singularités, pour la plupart musiciens ou amis, afin de ne pas avoir à rester seul enfermé dans son studio. Et lorsqu'il prend la route et monte
sur scène, Dear Reader le suit de près et assure le show tandis qu'il se retrouve à devoir manipuler un clavier midi bourré de boucles et de sons.
«Ca a l’air facile, et quand on réécoute on trouve ça étrange, pas orthodoxe. Quelque chose de simple va avec autre chose de tout aussi simple, pour finalement donner quelque chose de nouveau. Ma
façon de créer des morceaux est d’ajouter plein d’idées, ce qui a l’air confortable à la première approche mais est également intéressant au fur et à mesure des écoutes. Ma musique préférée, je
peux y entendre quelque chose de nouveau à la centième écoute».
Et croyez moi la route est longue.