Agnès Salomon
Je l'ai peu connu Agnès, disons que je l'ai connu petite,
puis un peu plus grande, là ou se moque un peu de nos personnes âgées,
là ou l'ingratitude ou le plaisir de vaquer à nos loisirs d'enfance nous font oublier ce qu'est de vieillir ....
Et pour cause, la dernière image d'Agnès ne fut pas des plus réjouissantes pour une fillette de 12 ans,
Un an avant Agnès avait suivi le cortège funéraire de sa fenêtre, trop faible pour assister au départ de sa petite fille morte du mal de vivre , morte à 30 ans à peine, seule un soir de mai.
Un an après presque jour pour jour, je suivais le cortège de mon Agnès, qui par desespoir se laissait mourir à petits feux par un cancer généralisé mais surtout par la peine innaceptable de voir que sa petite Sylvie était passée avant elle , de l'autre côté ....
Agnès était mon arrière grand-mère, une grand-mère réellement bonne comme de la mie de pain,
volumineuse et grande dame certes mais si chaleureuse auprès de ses nombreux chiens et chats, ses poules, ses oies méchantes et son dindon idiot.
Agnès , je n'ai pas eu le temps de connaitre un peu cette femme, sa vie, son mariage avec André, ses relations avec ses enfants, tout ce que je sais c'est qu'elle a élevé ma mère, sa petite Sylvie.
Elle l'avait eu en garde toute petite et la considérait les années passant comme sa fille,
Agnès c'était sa blouse de grand-mère fleurie, son tablier posé dessus, son chignon en épingle discret sur des cheveux fins blancs.
Agnès ne grondait jamais, peut être sa faiblesse, aucune autorité n'émanait de cette grande bonne femme, pourtant imposante, même avec ses chiens jamais je n'ai entendu le moindre orage, l'orage dont elle avait si peur , et que du haut de ses 1m75 bien tassés, elle se cachait les soirs d'éclairs dans son armoire,
Agnès c'était son lit avec de multiples oreillers, de multiples étredons, de couettes, de réveil qui fait tic tac toc et qui vous empeche de dormir, Agnès c'était son lit que si tu tombais tu te tuais ....
Elle était les tomates farcies faites maison, le café au lait avec la brioche du matin, les bonbons, le miel ,
elle était la douceur mon Agnès,
Ce soir je pense à elle ayant récupéré une de ces photos, et j'avoue que je maudis mon ingratitude d'enfant ,
je regrette de ne pas lui avoir posé des questions sur sa vie, son enfance, ses parents et ce qu'il l'avait amené à épouser pèpère André .....
Agnès, tu vois ce soir je pense à toi, car tu as été une femme des plus bonnes pour moi ,
tu as été une maman de substitution aimante pour ma propre mère ....
Embrasses bien ta petite Sylvie de ma part ....
de là haut ça sent d'ici bas le café au lait .....