Cette question, inimaginable il y a peu, est désormais omniprésente dans les débats. Pourtant, qui n’a éprouvé ces dernières années la fierté d’appartenir à cet espace qui après des siècles de déchirement, avait su trouver une solidarité et une puissance reconnues par le monde entier, avec un duel euro-dollar tournant largement à l’avantage de la nouvelle monnaie. Symbole éclatant de cette nouvelle ère de l’amitié franco-allemande. Depuis le rapprochement inouï réussi par de Gaulle et Adenauer, les deux peuples ont sympathisé au point que l’autre était devenu l’étranger qu’ils préféraient, les échanges culturels entre les jeunes se sont multipliés, la rivalité n’était plus de mise, l’amitié et la solidarité entre nos deux peuples triomphaient. On envisageait même une fusion organique de nos états.
Mais ces dernières années, le climat a bien changé. Certes, aucune rivalité nationaliste agressive n’est perceptible entre nos peuples, qui ont la sagesse d’être encore heureux de cette nouvelle amitié, et d’éviter toute dérive simpliste, porteuse d’un funeste passé. Mais la mentalité des élites allemandes a changé : leur nouvelle majorité, conduite par Angela Merkel, d’apparence benoîte, mais d’une impérieuse volonté de réussite, ne s’embarrasse plus de scrupules et de complexes d’un passé lourd. On ne saurait les en blâmer. La nouvelle génération n’est pas responsable des crimes nazis, dont ils sont maintenant très éloignés, comme pratiquement tous les peuples européens (les relents serbes d’ «épuration ethnique » seront bientôt un mauvais souvenir). Non, plus simplement les dirigeants allemands veulent que leur équipe gagne.
Ils veulent pour cela s’appuyer sur les qualités généralement admises de leur société : excellence de leur savoir-faire industriel et de leur formation professionnelle, esprit de responsabilité collectif exceptionnel, solidarité des couches sociales. Les exemples de leur abnégation individuelle au profit de l’intérêt collectif pullulent (comme l’intégration de l’ex RDA).