Parfois, je lis un texte qui ne semble pas trouver son chemin en moi. Et j’y reviens, sans trop savoir pourquoi. Alors il se peut que mon regard s’habitue à l’obscurité ou à la trop grande luminosité et que je commence à percevoir quelque chose. C’est ce que j’ai ressenti à la lecture de poèmes de Hans Magnus Enzensberger. En voici un.
TABLEAU D’OMBRES
Je peins la neige
je m’acharne
à peindre à plomb
avec un gros pinceau
sur cette page blanche
je peins la terre
je peins l’ombre
de la terre la nuit
je ne dors pas
je peins
toute la nuit
la neige tombe à plomb
et s’acharne
sur ce que je peins
une grande ombre
tombe
sur mon tableau d’ombres
sur cette ombre
je m’acharne à peindre
avec le gros pinceau
de la nuit
mon ombre minuscule