À l’ouest, il y a du nouveau. La candidature de DSK aux primaires se dessine et ce vrai-faux scoop suscite plus de levées de boucliers que qu’un enthousiasme délirant à l’égard de l’enfant prodigue de la famille socialiste.
Jean-Marc Ayrault patron des députés socialistes a beau souffler le froid en déclarant qu’il ne convient pas de faire “l’exégèse des déclarations des épouses“, il serait insultant de réduire Anne Sinclair au simple rôle de compagne du président du FMI. Elle est beaucoup plus que cela. Notamment, une redoutable communicante.
Coincé par son engagement à exercer jusqu’à son terme son mandat de directeur du FMI, DSK ne peut pour autant laisser Martine Aubry et François Hollande monter en puissance. Le déplacement de la patronne des socialistes au forum mondial de Dakar confirme le bras de fer qui se joue dans la perspective des primaires. En se situant à la gauche de la gauche, la maire de Lille entend bien droitiser un peu plus son rival DSK.
La petite phrase d’Anne Sinclair tombe à pic pour casser la communication de la première secrétaire du PS. En étouffant un incendie qui couve à sa gauche, le couple DSK - Sinclair ravive les braises à droite. Dans la majorité présidentielle on préférerait largement un candidat épouvantail de gauche à DSK que les compétences économiques rendent un peu trop sympathique à l’électorat de droite.
Ce n’est donc pas tout à fait un hasard si la machine médiatique à tuer s’est soudainement mise en marche et retournée contre celui qu’elle encensait quelques mois plus tôt. Étrangement, les vents des sondages se sont inversés. Difficile de ne pas lire ici ou là un article nous assurant de la dégringolade dans l’opinion de DSK. Il avait hier toutes les qualités, la perspective de son retour lui confère tous les défauts.
La ritournelle est bien rodée. DSK est présenté à la fois comme un représentant de la “gauche ultra-caviar” et “bobo” et le candidat de l’étranger, celui qui ne serait plus en phase avec les le pays quitté depuis trop longtemps. Christian Jacob nouveau patron des députés UMP, copé-collé du député-maire de Meaux, accuse ainsi avec la finesse qui le caractérise DSK de ne pas être “à l’image de la France”. Un mauvais fumet qui renvoie aux sordides clichés des années 30 toujours présents dans la mémoire collective.
La gauche de la gauche ne cache pas non plus ses doutes sur l’appartenance de DSK à leur camp. Mélenchon soigne son électorat en stigmatisant régulièrement le directeur du FMI, Cécile Duflot et Benoît Hamon cachent à peine plus leurs réticences.
La nervosité exprimée par les ténors de l’UMP ainsi que la méfiance d’une partie de la gauche donnent raison à la stratégie de DSK qui consiste à repousser aussi loin que possible sa déclaration de candidature. Outre le fait de rendre chèvres ses opposants, le petit jeu du je viens- je viens pas retarde au maximum les attaques violentes à l’égard du patron du FMI.
Trois verbes dans le milieu des courses hippiques définissent le champion : atteindre, lutter, dépasser. En sortant du bois à la dernière minute, DSK entend bien économiser ses forces et les conserver pour la phase ultime.
Qu’on le veuille ou non, il est celui qui fait le jeu, celui autour duquel s’organise le jeu. La vraie question posée aujourd’hui est de savoir si un couple fortuné, très fortuné, peut porter des valeurs de gauche. Le vrai handicap de DSK porte plus sur son train de vie et son patrimoine que sur son rôle de directeur du FMI dans lequel il a accompli jusqu’ici un sans-faute.
La réponse ne peut passer par des brevets de gauche dispensés ici ou là par différentes personnalités. Vincent Peillon ancien proche de Ségolène Royal affirme bien dans les colonnes du quotidien Le Monde, qu’ “Il faut en finir avec cette idée qui voudrait qu’il y ait des divergences de fond entre Martine Aubry et Dominique Strauss-Kahn”, le problème n’est plus là.
Bill et Hillary Clinton ont démontré à leur façon qu’on peut mener une politique progressiste en étant fortunés. À l’inverse, Nicolas Sarkozy a démontré les risques que constitue l’arrivée au pouvoir de mercenaires venus chercher en politique les moyens de faire fortune.
Être riche, comme DSK, ne pas aimer les riches comme François Hollande, la question de l’argent et des situations financières personnelles n’ont pas fini de troubler les socialistes. Des socialistes qui n’ont jamais assumé officiellement leur conversion au capitalisme et leur renoncement au grand soir. Autant dire que les primaires qui se profilent permettront peut-être de mettre un terme à cette grande hypocrisie entre un discours très anticapitaliste et des situations personnelles devenues financièrement très confortables par le biais du cumul des mandats électifs.
À cet égard DSK offre aux socialistes le reflet de leur propre image. D’une caste politique qui au fil des années s’est coupée de la réalité sociologique du terrain. En cela, les primaires malgré tous leurs défauts sont une chance pour DSK. En permettant de contourner le petit noyau de militants socialistes non représentatifs de la société civile, souvent liés ou inféodés à des barons locaux, elles donneront une forte légitimité au vainqueur.
Largement désigné par les primaires, DSK ne serait plus seulement le candidat des bobos ou de la gauche caviar comme l’affirme l’UMP mais celui d’une gauche rassemblée, en toute connaissance de cause, derrière son candidat.
Signe de cette union sacrée susceptible de voir le jour, Eva Joly candidate potentielle des écologistes aux présidentielles déclarait dimanche sur RTL que, l’objectif numéro 1 c’est de battre Nicolas Sarkozy en 2012. “Si c’est Dominique Strauss-Kahn qui est le mieux placé pour faire cela, et si nos objectifs écologiques sont pris en considération dans le pacte que nous passerions entre le 1er et le deuxième tour (…) j’appellerai à voter pour lui “, a ainsi déclaré l’ancienne magistrate.