Hier, en relisant quelques pages du roman de Virginia Woolf Années, je me suis posé la question suivante : nier la réalité, est-ce un bon moyen de faire en sorte que cette réalité n’existe plus ? Question qui pourrait déboucher sur une réflexion philosophique, à l’instar de Berkeley, philosophe anglais qui s’interroge sur la réalité des choses. Un des personnages du roman l’évoque et se demande si les arbres existeraient si on ne les voyait pas. Il suffirait dès lors de fermer les yeux pour que plus rien n’existât. Je n’ai pu m’empêcher de faire un parallèle avec une attitude qui est fort courante chez l’espèce humaine. Ce principe ne préside-t-il pas aux sujets tabous dont, pour une raison ou pour une autre, on ne parle pas ? Le silence est alors une façon d’affirmer que cette réalité n’existe pas.
Lorsque l’on se maintient sur le plan strictement intellectuel, l’idée est séduisante et peut donner lieu à de nombreux développements. Mais lorsqu’on l’applique concrètement dans ce qu’on appelle la vie quotidienne, je crains que cette belle idée ne conduise à des comportements sinon dangereux, du moins ridicules et finalement assez lâches et ne nous conduise à un aveuglement qui risque d’en révéler bien plus sur nos défauts que toutes nos paroles. Qu’en pensez-vous ?