Dans une très intéressante tribune du Monde, “Révolution post-islamiste”, O. Roy dénonce les hésitations occidentales face aux évènements tunisien et égyptien, dans l’attente des suivants.
“Cette nouvelle génération ne s’intéresse pas à l’idéologie : les slogans sont tous pragmatiques et concrets (”dégage”, “erhal“) ; il ne font pas appel à l’islam comme leurs prédécesseurs le faisaient en Algérie à la fin des années 1980. Ils expriment avant tout un rejet des dictatures corrompues et une demande de démocratie. Cela ne veut évidemment pas dire que les manifestants sont laïcs, mais simplement qu’ils ne voient pas dans l’islam une idéologie politique à même de créer un ordre meilleur : ils sont bien dans un espace politique séculier. Et il en va de même pour les autres idéologies : ils sont nationalistes (voir les drapeaux agités) mais ne prônent pas le nationalisme. Plus originale est la mise en sourdine des théories du complot : les Etats-Unis et Israël (ou la France en Tunisie, qui a pourtant soutenu Ben Ali jusqu’au bout) ne sont pas désignés comme la cause des malheur du monde arabe. Même le pan-arabisme a disparu comme slogan, alors même que l’effet de mimétisme qui jette les Egyptiens et les Yéménites dans la rue à la suite des événements de Tunis montre qu’il y a bien une réalité politique du monde arabe”.
Ces “révolutions” (je ne sais si le terme est totalement pertinent) sont essentiellement le fait, au départ, de jeunes, plus éduqués que ceux d’il y a une trentaine d’année résultat, en Tunisie,d’une révolution démographique de familles sensiblement moins nombreuses, de forts progrès de la condition féminine, héritée de Bourguib. Des gens qui réclament du travail, de la démocratie et qui s’indignent de la corruption des gérontocraties les dirigeant. Les soutiens bruyants du Hamas et de l’Iran (ou corruption et dicatature sont la règle) tombent dans le vide, ne sont pas repris et, si de vieilles structures islamistes, héritière du passé sont présentes, elles se sont fait discrètes et me semblent regarder davantage vers les islamistes turcs, actuellement au pouvoir, sans grandes vagues, que vers les intégristes.
Comme le dit l’article, “Ils sont peut-être croyants, mais séparent cela de leur revendications politiques : en ce sens le mouvement est “séculier”, car il sépare religion et politique. La pratique religieuse s’est individualisée”. Et cela constitue un fait majeur qui doivent nous amener à encourager et soutenir ces mouvements que nos brillants dirigeants ont été incapables d’apprécier. Mais, là encore, comme le souligne l’article, “Ceci dit une révolte ne fait pas une révolution. Le mouvement n’a pas de leaders, pas de partis politiques et pas d’encadrement, ce qui est cohérent avec sa nature mais pose le problème de l’institutionnalisation de la démocratie. Il est peu probable que la disparition d’une dictature entraîne automatiquement la mise en place d’une démocratie libérale, comme Washington l’espérait pour l’Irak. Il y a dans chaque pays arabe, comme ailleurs, un paysage politique d’autant plus complexe qu’il a été occulté par la dictature”.
Dans ces deux pays, et dans quelques autres, c’est l’armée qui détient les clés des évolutions et, là encore, elle semble s’accomoder du modèle turc plutôt que de celui du pronociamento.
Je suis curieux de voir comment les choses, porteuses d’immenses espoirs et pas seulement dans les pays arabes, vont évoluer, à la fois dans chacun de ces pays et dans les autres parce que je crois qu’enfin,on peut commencer à être optimiste sur l’avenir de la majorité des pays arabes.
- Certes, elle a gagné. Mais, en rugby, l’équipe de France face à l’Irlande a rendue une bien mauvaise copie, aggravée par un bien mauvais arbitrage. Je crains fort une raclée par les anglais.