Rosemay NIVARD (La Réunion).

Par Ananda

BAYA

Te voilà femme tronc d’arbre

avec ta main de poulpe posée sur ta cuisse

tu touches terre à nouveau

au risque

nouveau bateau- bus

nouvelle route fleuve

tu as touché la mort

lippe écorce

me râpe la joue

je te soutiens

sans te mouiller

mes larmes- mains

sont cristaux ou fossiles

après l’attente

après ces longs mois allongée

les yeux au plafond

le souffle fort

tu inventes un langage nouveau

des mots nouveaux

Tamaman Kamaman Tekamaman

Trois mystères soufflés pour tout dire

Joie attente colère

Témoin

Je suis témoin

Tu es témoin

Le monde est témoin

Tout est problème

Le lit, le vent, la pluie

Tamaman Kamaman Tekamaman

Les secondes étonnées s’essoufflent

s’arrêtent

cherchent sens à tout cela

femme tronc

jambes racines

mortes à moitié

tressautant parfois

incongrue danse sans musique

et ces ongles qui n’en finissent pas de pousser

as-tu voulu gratter la porte de paradis ?

équerre de ce coude angle géométrie

imparfaite du corps

laver

laver le corps

mousse malodorante

où remonte le temps

la mère lave l’enfant

puis l’enfant lave la mère

une fois devenue mère elle aussi

ici on a sauté un maillon

l’enfant lave la femme tronc

le bras à poulpe

l’angle obtus

le chagrin courbe

en boucle

Te voilà femme- tronc

Tamaman Kamaman Tekamaman

Tu ne connais même plus le prénom

Le prénom de l’enfant

Ton nouveau bras

Ton instrument

Tes jambes par procuration

Enfant branche

Debout

Raidi

Présent

Dont la sève fulmine

Et cherche un voyage intérieur

Une vie vertigineuse

Un ailleurs

in Océan Indien, Les Xérographes, 2006