BAYA
Te voilà femme tronc d’arbre
avec ta main de poulpe posée sur ta cuisse
tu touches terre à nouveau
au risque
nouveau bateau- bus
nouvelle route fleuve
tu as touché la mort
lippe écorce
me râpe la joue
je te soutiens
sans te mouiller
mes larmes- mains
sont cristaux ou fossiles
après l’attente
après ces longs mois allongée
les yeux au plafond
le souffle fort
tu inventes un langage nouveau
des mots nouveaux
Tamaman Kamaman Tekamaman
Trois mystères soufflés pour tout dire
Joie attente colère
Témoin
Je suis témoin
Tu es témoin
Le monde est témoin
Tout est problème
Le lit, le vent, la pluie
Tamaman Kamaman Tekamaman
Les secondes étonnées s’essoufflent
s’arrêtent
cherchent sens à tout cela
femme tronc
jambes racines
mortes à moitié
tressautant parfois
incongrue danse sans musique
et ces ongles qui n’en finissent pas de pousser
as-tu voulu gratter la porte de paradis ?
équerre de ce coude angle géométrie
imparfaite du corps
laver
laver le corps
mousse malodorante
où remonte le temps
la mère lave l’enfant
puis l’enfant lave la mère
une fois devenue mère elle aussi
ici on a sauté un maillon
l’enfant lave la femme tronc
le bras à poulpe
l’angle obtus
le chagrin courbe
en boucle
Te voilà femme- tronc
Tamaman Kamaman Tekamaman
Tu ne connais même plus le prénom
Le prénom de l’enfant
Ton nouveau bras
Ton instrument
Tes jambes par procuration
Enfant branche
Debout
Raidi
Présent
Dont la sève fulmine
Et cherche un voyage intérieur
Une vie vertigineuse
Un ailleurs
in Océan Indien, Les Xérographes, 2006