Il aura fallu dix-huit jours pour chasser Moubarak de ses vingt-neuf années de régime autocratique.
Je dois dire que politiquement, cela n’a rien à voir avec la fuite de Ben Ali.
L’Égypte, au contraire de la Tunisie, est un très grand pays. Le plus grand pays arabe. Quatre-vingt-cinq millions d’habitants. Avec tout
le prestige diplomatique, linguistique, culturel et historique qui est attaché. Il est l’un des grands pôles du Proche- et Moyen-Orient et c’est sur lui qu’a pesé toute la stabilité de la région
grâce à la paix avec Israël.
C’est la première fois que le peuple égyptien s’est soulevé. C’est la première fois qu’un peuple arabe s’est soulevé avec des intentions réellement pacifiques et démocratiques. C’est aussi la
première fois que l’armée n’a pas répondu par les armes.
Il y a eu plusieurs centaines de morts depuis le "Jour de la colère" du mardi 25 janvier 2011. Il y a eu deux journées d’affrontements les
1er et 2 février 2011 avec des miliciens. Heureusement, dans sa grande
globalité, le mouvement révolutionnaire est resté résolument pacifique. Car les caméras du monde entier étaient braquées sur lui.
C’est la première grande révolution avec les nouvelles technologies.
J’ai entendu l’ambassadeur d’Égypte en France, Nasser Kamel, qui a montré un sang-froid remarquable en approuvant à la fois la démarche de
la foule et en restant fidèle à sa hiérarchie. Courage de parler aux journalistes alors que tout change dans son propre État. Nasser Kamel considère qu’une Égypte plus démocratique sera une
Égypte plus forte, plus écoutée sur la scène internationale et plus stable, plus propice à maintenir les accords de paix. Il a cependant trouvé que le gouvernement américain
communiquait un peu trop dans ces événements.
Le pire n’est jamais sûr. Mais le meilleur non plus. Tout peut aussi basculer.
J’ai cette émotion comme lors de la formation du premier gouvernement non communiste en Pologne ou encore comme lors de la chute du mur de Berlin. Je n’oublie pas Pékin le 4 juin 1989 ni Bucarest le
25 décembre 1989.
Les Égyptiens ont maintenant six mois pour organiser une élection présidentielle pluraliste et démocratique en septembre 2011.
Je crois qu'au Caire, la terreur de la Révolution iranienne hante tous les esprits comme contre-exemple à ne pas suivre.
Le peuple égyptien s’est libéré lui-même, hors de toute pression, américaine ou islamiste.
Entrant dans l’histoire, le peuple égyptien aspire à devenir le premier modèle de démocratie arabe.
Bienvenue dans le nouveau monde, amis égyptiens !
Aussi sur le
blog.
Sylvain Rakotoarison (11 février 2011)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
La
révolution égyptienne en marche.
http://www.agoravox.fr/actualites/international/article/egypte-au-revoir-hosni-moubarak-88717