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L'Illuminé

Publié le 09 février 2011 par Gjouin @GilbertJouin
L'Illuminé
Théâtre Dejazet
41, boulevard du temple
75003 Paris
Tel : 01 48 87 52 55
Métro : République
Spectacle écrit et mis en scène par Marc Hollogne
Avec, sur scène : Marc Hollogne (Le Chevalier de Casignac), Laurent Dauvillée (Gastille), Nicolas Goret (Le Père Gorette)… Sur l’écran : Rufus (Maître Vaubard), Mathilda May (La Comtesse de Leauvive), Michel Jonasz (Le Comte de Leauvive), Angela Delfini (Bella), Jean-Paul Bordes (Monsieur de Vellasse), Nathalie Gillet (La Gouvernante)…
Ma note : 5,5 /10

L’histoire
: En 1788 se dessine une révolution qui n’en est encore qu’à ses tout premiers balbutiements : la révolution… industrielle !
En moins de dix ans, depuis que Rousseau a refermé les pages de sa vie, l’invention des « pompes à vapeur » bouleverse la cadence naturelle qui relie l’homme à la nature. L’instinct du Chevalier de Casignac lui hurle qu’il faut interdire la multiplication de ces machines qui permettent au mouvement mécanique de remplacer l’effort musculaire.
Fans un langage riche en illuminations métaphoriques, L’Illuminé évoque entre autres l’ordinateur, le GPS, tout cet environnement d’aujourd’hui truffé de dépendances technologiques…
Mon avis : L’Illuminé est le troisième spectacle estampillé « Cinéma-théâtre » de Marc Hollogne que je vois. Le tout premier, Marciel monte à Paris avait été un véritable choc artistique et émotionnel. C’était du jamais vu. J’avais rarement été aussi emballé. C’était tellement original et novateur, et tellement plein de candeur, de tendresse et d’humour… Je me suis donc précipité pour découvrir le deuxième spectacle, Marciel en campagne. J’en avais même fait la pub avant de l’avoir vu, ravi que j’étais de voir réédités cette performance et ce traitement pittoresque. Hélas, patatras, je n’ai pas retrouvé ces sensations qui m’avaient tant exalté. Ce spectacle m’avait paru poussif, besogneux et mal abouti. J’avais quitté la salle déçu et dépité.
Hors donc, Marc Hollogne est de retour avec un nouveau projet on ne peut plus ambitieux. Toujours fidèle à son procédé de cinéma-théâtre, il nous entraîne cette fois à la fin du 18è siècle, à une toute petite encablure de la Révolution Française.
Les premières images de ce qui apparaîtra finalement un peu comme un conte philosophique sur le thème de la révolution industrielle sont absolument magiques. On est immédiatement charmé par la qualité de la reconstitution, la beauté des costumes, l’esthétique sépia de la photographie. Car ce spectacle est très ambitieux. On imagine le temps, l’énergie et les moyens que Marc Hollogne a dû dépenser pour obtenir un tel résultat. Cet homme est un ultra perfectionniste, un méticuleux, un passionné. Son Chevalier de Casignac est une sorte de Don Quichotte parti en croisade contre les moulins de la modernité symbolisés ici par la machine-outil. Le propos est donc louable.
Si nos yeux sont comblés par le décorum, par l’image, en revanche nos oreilles le sont moins par ce qu’elles vont essayer de capter pendant une heure et demie tant c’est fumeux, nébuleux, à la limité de l’hermétique. Le texte écrit par Marc Hollogne est excessivement intellectuel. Trop de langage châtié tue l’effet, ça en devient redondant. Et que dire de cette explosion d’alexandrins qui ont plus tendance à nous anesthésier qu’à nous enflammer. Il a voulu faire du style, élever très haut sa prose et ses vers, mais il en résulte un spectacle excessivement verbeux dont on décroche très rapidement.
Il ne nous reste que le jeu des comédiens. Marc Hollogne, à qui on ne peut reprocher sa folle générosité, se livre à une sorte de one man show, à une formidable performance d’acteur que l’on est obligé de saluer et d’admirer. Sa tirade sur « la femme idéale » est un grand moment… Mais il a beau se démener, se dépenser sans compter, ses propos grandiloquents anéantissent sa folle énergie. Un peu plus de simplicité eût rendu sa pièce bien plus accessible (je pense notamment au jeune public).
Quant aux acteurs qui évoluent sur l’écran, on ne peut rien leur reprocher. Ils jouent et disent ce qu’on leur a donné à jouer et à dire. Et c’est toujours un bonheur que de retrouver un Rufus, un Michel Jonasz et une Mathilda May joliment vibrante d’émotion difficilement contenue.
Bref, mieux vaut ne faut pas être fatigué par sa journée de travail pour aller rôder du côté du théâtre Dejazet et essayer d’extraire la substantifique moelle du message visionnaire que notre Chevalier idéaliste tente de nous faire passer. Ce spectacle est vraiment trop élitiste. Peut-être vaut-il mieux le lire que le voir. Bien que, je tiens à le redire, esthétiquement et techniquement, c’est une totale réussite.

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