La réalisation d'un traité mondial sur le mercure prend de l'ampleur suite à une réunion de plus de 120 États au Japon. Les gouvernements mondiaux se sont en effet réunis la semaine dernière, dans la ville de Chiba, en vue de poursuivre les négociations sur la création d'un traité mondial sur le mercure et ainsi aider à réduire les sources de pollution que crée ce produit chimique.
La réunion du Comité de négociation intergouvernemental (CNI), dont la branche " Produits chimiques " du PNUE (Programme des Nations Unies pour l'environnement) assure le secrétariat, a été la deuxième d'une série de cinq réunions qui devraient aboutir à une législation sur le mercure juridiquement contraignante d'ici 2013.
Bien que les délégués aient mis l'accent sur le futur, les négociations ont débuté sur des réflexions concernant un événement tragique du passé: les victimes de la maladie de Minamata. Cette maladie fut causée par les rejets industriels soutenus de produits contenant du mercure dans la baie de Minamata, au Japon, entre les années 1930 et 1960. Les malades se sont adressés aux participants de la conférence, appelant ceux-ci à progresser vers l'achèvement d'un traité mondial en la matière. Environ 3.000 personnes souffrent encore de la maladie de Minamata, dont les effets comprennent des difformités physiques et des maladies mentales.
Aujourd'hui, la présence de mercure dans l'environnement reste une préoccupation mondiale pour les raisons suivantes: sa volatilité et son transport sur de longues distances dans l'atmosphère via les courants atmosphériques, sa persistance dans l'environnement et sa capacité à contaminer les écosystèmes et les chaînes alimentaires.
L'exposition au mercure a un effet négatif sur la santé humaine; elle entraine notamment des dommages permanents au système nerveux. Les femmes et les enfants y sont particulièrement vulnérables car la contamination au mercure peut se transmettre d'une mère à son enfant lors de la grossesse.
A Chiba, les délégués ont ainsi exprimé leur accord sur la nécessité de réduire les risques de contamination au mercure sur la santé humaine et sur l'environnement, afin que des événements comme ceux qui se sont déroulés dans la baie de Minamata, au Japon, ne se reproduisent pas.
Une des questions principale en jeu dans les négociations vers ce nouveau traité mondial est la manière de traiter les principales émissions de mercure provenant de l'industrie, en particulier celles provenant de la combustion du charbon pour la production d'électricité. Un autre problème est celui de l'élimination progressive de l'utilisation du mercure dans une variété de produits tels que les dispositifs médicaux. Enfin, à petite échelle, il faudrait encourager les chercheurs d'or locaux à mettre fin à l'utilisation de mercure pour filtrer leur or, de même qu'il faudrait gérer les déchets de mercure et les sites contaminés.
Lire : La France et le Brésil coopèrent pour lutter contre l'orpaillage illégal
De nombreuses délégations ont aussi souligné la nécessité de continuer à autoriser l'utilisation exceptionnelle de mercure dans la fabrication de certains produits et au cours de certains processus. Le futur traité devra ainsi nécessairement distinguer les déchets contenant du mercure, des "marchandise" contenant du mercure. En effet, le processus d'élimination du mercure est particulièrement difficile. En tant qu'élément chimique, le mercure ne peut pas être détruit. Il peut uniquement être entreposé, soit sous sa forme régulière ou soit sous une forme inerte, moins dangereuse grâce à un processus de stabilisation (par exemple en faisant réagir le mercure avec du soufre). Les pays en développement ont bien vite constaté la complexité et les coûts de la plupart des techniques de stockage. L'exportation de mercure pour un stockage écologiquement rationnel a été jugé importante pour certaines régions, notamment pour les petits États insulaires.
Enfin notons que la combustion du charbon est la principale source des émissions de mercure dans l'air. Les Etats dépendants d'électricité produite à partir de charbon ont ainsi fait savoir, au cours des négociations, de l'importance de contrôler les émissions tout en ne limitant pas leur développement économique. Ces pays ont par ailleurs indiqué leur réticence à tenir compte des objectifs contraignants de réduction du mercure. Toutefois, certains d'entre eux ont également attiré l'attention sur l'existence et la poursuite d'efforts importants en matière de réduction d'émissions d'une vaste gamme de polluants atmosphériques, dont le mercure.
Après avoir discuté de tous ces éléments, le comité mandaté par le PNUE devra élaborer un projet de texte contenant une approche globale, appropriée et mesurée sur la problématique du mercure. Ce projet de texte sera examiné lors de la troisième session des négociations qui se tiendra en Afrique, en octobre 2011. Il devra être basé sur les éléments du projet discutés à Chiba et devra refléter les vues exprimées lors des négociations. Les Parties devront soumettre le texte par écrit au Secrétariat, et ce avant le 25 mars 2011.
Stella Giani