Cette question peut paraitre incongrue mais elle est d'une importance capitale et est, pour tout dire, le centre de toute réforme de la dépendance...
En effet deux écoles de pensée s'affrontent:
1 - La dépendance est une charge familiale.
Pour vous la faire courte, certains pensent que la dépendance est l'évolution normale d'une vie et qu'il est normal et qu'il revient à la famille d'assumer la perte d'indépendance de ses membres... L'État est alors là pour aider un peu et mais c'est tout.
Ainsi personne ne vient changer les couches de vos gosses et donc de même vous devez changer celles de vos parents, même causes, même effets.
Ce sont les mêmes qui font passer tranquillement dans l'opinion qu'il est "intolérable" de mettre ses parents en maison de retraite, la norme étant et devant être de les garder chez soi, de les assumer jusqu'au bout.
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2- La dépendance n'est pas une charge familiale
Vision plus "républicaine" même si carrément en perte de vitesse, certains pensent que c'est à chacun de penser et préparer seul son avenir et qu'il revient à l'état d'organiser la prise en charge de la dépendance comme celle de la maladie.D'où des aides financière ou matérielles pour accueillir les personnes dépendantes qui ne peuvent vivre seules. La dépendance est alors vue comme la pathologie comme un accident de la vie, accident contre lequel chacun cotise toute sa vie et bénéficie des "fruits" en cas de besoin.
3- Mon avis à moi que j'ai.
Une fois n'est pas coutume je vais formuler mon avis personnel , avis qui n'engage que moi évidemment.
Pour faire simple je déteste l'idée que la dépendance soit une charge familiale, idée anti républicaine au possible et qui clairement nous renvoie à l'ancien régime ou chacun se définissait d'abord comme membre à part entière d'un clan pour le meilleur (héritage et réseau ) et pour le pire (le poids de la dépendance de ses proches sur sa vie propre).
Je pense donc que la dépendance est et doit être une charge étatique comme la maladie, ce n'est pas aux générations suivante de supporter le poids de la perte d'autonomie de la génération au dessus. Et le parallèle avec l'enfance ne tient pas puisque on choisit de faire un enfant et de l'assumer alors qu'on ne choisit pas la charge de la dépendance de ses proches.
Alors on va me dire que "je suis un sans cœur qui veut abandonner ses parents en maison de retraite" et je réponds en souriant que mes parents vivront où ils voudront tant qu'ils seront indépendants et qu'ensuite il devront trouver une structure pour les accueillir quand cela ne sera plus le cas. Mes parents ont cotisé toute leur vie, payé des impôts pour l'Etat et c'est à l'État de leur proposer une solution viable, pas à moi. Et je n'ai pas l'ombre d'une culpabilité en disant ça.
Si d'autres souhaitent accueillir leurs parents chez eux c'est parfait mais j'espère encore que l'Etat les aidera car je sais l'investissement (et je pèse mes mots) personnel et financier que cela suppose (garder ses parents c'est ne plus pouvoir travailler à plein temps, ne plus pouvoir partir en vacances ni même en week-end, c'est un travail a plus que plein temps...).
La culpabilité flottante qu'on essaye de nous coller (cf la vidéo au dessus) au nom de la "tradition" et de la "normalité"me semble donc inacceptable et populiste. L'état est là pour aider à chacun dans ses choix, en aucun cas pour les imposer... Même si cela arrange tout le monde et surtout pour des raisons financières... Et quand à la "tradition" s'il s'agissait encore de laisser ses vieux de 70 ans crever tranquillement au coin du feu, gardé par la femme du foyer qui ne travaille pas dans les grandes fermes des Vosges... Évidemment le problème se poserait différemment qu'aujourd'hui ou l'espérance de vie dépasse les 80 ans et que les pathologies dégénératives demandant une attention permanente explosent ...
Tiens d'ailleurs c'est drôle pourquoi personne ne pointe ça?
Ps : Vouloir mettre ses parents dans une institution spécialisée n'exonère par contre de vigilance... Quels soins, quels salaires justifient les prix de journées, que signifie que les maison de retraites sont considérée comme des placements d'avenir? voilà des bonnes questions à se poser... Dés qu'on a cessé de se taire en culpabilisant...