Je regardais Ghislain Leblond ce soir à Tout le monde en parle et je me suis mis étrangement à penser à cette douce semaine de vacance d’été à St-Vallier où mononc’ Ghislain et matant’ Huguette nous accueillaient à leur chalet. À l’époque, cousine Maude était haute comme ça et Virginie (sa future soeur) était, comme qui dirait, dans le cercle d’attente. J’avais quoi, 10-11 ans? J’étais foubraque de sport, particulièrement de baseball. J’étais lanceur dans la ligue mineure à Rimouski et je chérissais les rares moments que je partageais avec mes oncles, sportifs pour la plupart, qui m’apprenaient les rudiments du sport. En particulier, une journée à St-Vallier était incomplète sans une séance de pitch n’ catch avec Ghislain.
- (Ghislain:) Comme ça t’es lanceur… Montre-moi donc ta courbe.
- Ma courbe? J’en ai pas. J’ai une bonne rapide par exemple.
- Quoi? T’es lanceur pis ta pas de courbe? On va régler ça tout de suite.
La séance de catch fut plus longue que prévu cette journée-là. Jusqu’à ce que je pogne la twist. La twist du poignet, dans ce cas-là. Pour moi, la joie d’apprendre à lancer une balle courbe fut probablement comparable à celle où je suis finalement passé de 4 à 2 roues sur ma bicyclette.
Je regardais donc Ghislain Leblond ce soir à Tout le monde en parle discuter de la Consultation publique sur la question de mourir dans la dignité et de sa forme rare de sclérose qui le paralyse à petits feux depuis plus de 40 ans, et j’ai ressenti une belle fierté. Fier d’être du même sang, de la même souche. Fier de voir combien cet homme cultivé et intelligent garde la tête froide malgré sa condition et casse soudainement la voix quand il explique combien c’est difficile pour ses proches, pour sa femme. Huguette.
Fier de penser que, quelquefois, quand je fais dans l’humour cynique et pince-sans-rire avec mes soeurs, l’une d’elles me renvoie un “tu fais du Ghislain!”, en sachant combien la remarque me fait plaisir.
Faire du Ghislain. Comme j’aimerais en faire plus, du Ghislain. J’aimerais avoir la moitié de son courage, le tiers de sa persévérance. Si j’avais su, je lui aurais demandé qu’il m’enseigne cela en plus de l’art de lancer la courbe, cet été-là, sur le bord du fleuve.
Pour l’instant, je ne peux que continuer à m’inspirer toujours un peu plus de cet homme admirable. Et j’espère de tout coeur que son combat mènera au dénouement souhaité, aussi triste puisse-t-il être.