Comment lire cette anthologie proposée par Edouard Glissant ? Quand on y entre, on a le sentiment de prendre en plein visage les vents alizés. Et on ne sait pas où tourner le regard, il y a tant à lire ! J’ai essayé une première fois. J’ai reposé le livre. Une seconde fois. Pas mieux. Et puis, allez savoir pourquoi, la troisième fois m’a porté sur sa vague. Comme si j’avais trouvé la clé, la méthode, qui est de se laisser porter. Parfois on trouve un poème, une phrase, un mot qui invite à s’arrêter ; parfois il suffit de lire une page. Si la lecture déconcerte, c’est sans doute parce qu’elle ne passe pas par les chemins dont j’ai l’habitude. Certes, je reconnais un texte de Charles Baudelaire, les mots d’Aimé Césaire, je rencontre Borgès, Whitman, Rilke, et je découvre tant de textes qui me font emprunter tant de routes inconnues, de mers, de lumières. Il faut donc, d’abord, accepter de voir le monde autrement, et, à la suite de Gaston Miron, de dire :
Je demande pardon aux poètes que j’ai pillés
poètes de tous pays, de toutes époques,
je n’avais pas d’autres mots, d’autres écritures
que les vôtres, mais d’une façon, frères,
c’est un bien grand hommage à vous
car aujourd’hui, ici, entre nous, il y a
d’un homme à l’autre des mots qui sont
le propre fil conducteur de l’homme,
merci.