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Catherine et Annie, les deux sœurs, les deux inséparables, qui exploitent ce lieu magique. PHOTO XAVIER LEOTY
C'est une de ces adresses où, comme dans les auberges espagnoles, on vous apporte directement le petit quart de rouge sur la table, à l'heure du déjeuner, en vous souhaitant la bienvenue.
Que va devenir le café Populaire, l'âme de La Pallice ?
L'établissement inauguré en 1890, en même temps que le port de commerce de La Rochelle, est aujourd'hui menacé de fermeture, faute de la réalisation d'aménagements de sécurité.
Annie et Catherine, les deux sœurs, les deux inséparables qui exploitent cet endroit magnifique, racontent. « Les pompiers et la commission de sécurité sont passés. Nous devons notamment faire édifier une cloison coupe-feu à l'étage, pour les trois chambres d'hôtel que nous exploitons. Nous devons également mettre la cuisine aux normes… »
Investir ou fermer ?
Que vont décider les deux sœurs ? Investir pour les quelques années qui les séparent de leur retraite ? Ou bien mettre la clef sous la porte et priver La Rochelle de cet endroit magique ?
Aujourd'hui, le café-hôtel-restaurant est plus que centenaire. Et son histoire est prodigieuse.
Des idées d'avant-garde
En 1890, les arrière-grands-parents de Catherine et d'Annie quittent leurs Deux-Sèvres natales. « Leurs meubles et les pierres nécessaires à la construction du café sont arrivés par l'eau, le long de la Sèvre-Niortaise puis du canal de Marans, témoigne Annie. Nos arrière-grands-parents ont ouvert un café qui s'appelait le Débit populaire et qui était alors installé sur le quai sud, derrière la base sous-marine qui n'existait pas encore. Il y avait de grandes tables encombrées par les chopines de rouge et les jeux de cartes. On servait la soupe aux ouvriers du port… »
L'établissement faisait alors café et vendait de la petite épicerie. L'arrière-grand-père de Catherine et d'Annie travaillait dur. Il prit quand même le temps de militer et de participer à la création du syndicat des dockers. « C'était quelqu'un de très avancé dans ses idées, témoigne Annie. Des idées d'avant-garde… Toute la famille a d'ailleurs toujours été communiste et nous sommes restées dans le même courant d'idées ».
Dans les années cinquante
Le Débit populaire restera quai sud jusqu'à la dernière guerre.
C'est en 1952 qu'il s'installe à son adresse actuelle, sur la place du Marché, et prend le nom de café Populaire. Un petit hôtel de cinq chambres ouvre alors à l'étage, pour accueillir des ouvriers en déplacement, des gens des chantiers navals et des familles modestes.
C'est l'époque du père et de la mère d'Annie et Catherine, René et Alice. Alice est partie en 2008. A un âge avancé mais toujours vaillante. Elle reste dans les souvenirs du quartier comme cette élégante vieille dame aux cheveux mousseux qui, les soirs où le café donnait un spectacle de cabaret, battait la mesure de la musique avec sa chaussure sous le comptoir…
Quatrième génération
En 1977, Annie prend la relève. Sa sœur Catherine, institutrice, la rejoint au café lorsqu'elle prend sa retraite.
Aujourd'hui, ce lieu mythique s'anime en deux temps. Le dimanche avec l'immense et formidable marché de La Pallice, en semaine avec les habitués qui viennent déjeuner au Populaire et qui, toujours, reviennent.
Car on mange, quart de vin compris, avec fromage et dessert, pour un peu plus de dix euros. Et, détail qui a son importance, l'excellent rôti de bœuf s'acoquine de quelques pointes d'ail. Quant aux frites, Christine, la serveuse, le garantit dans un immense sourire, elles sont « maison ».