J comme Joie - Algérie, 1962 © Marc Riboud
Réapprendre à regarder la vie
L’exposition à la Maison Européenne de la Photographie (MEP) consacre jusqu’au 30 janvier 2011 une rétrospective à Marc Riboud, sous forme d’abécédaire photographique. Le b.a.-ba du photo reportage.
« I comme Image », reprend les thèmes chers à l’artiste, auteur de quelques-unes des photos les plus célèbres du XXe siècle. Qui ne se souvient pas, en effet, de cette jeune Américaine tenant une fleur face à une rangée de baïonnettes pendant la « marche pour la paix au Vietnam »? Image universelle de liberté. Qui n’a pas rêvé, sauf celui souffrant de vertige, d’être ce célèbre peintre Zazou dansant en équilibre sur les poutrelles de la Tour Eiffel ?
L’instinct de l’instant
« C’est tout proche et si loin » Rien ne pourrait mieux résumer l’œuvre de Marc Riboud que la phrase d’Henri Cartier Bresson. Chine, Japon, Inde, Afghanistan, Maroc : aussi loin que l’artiste nous entraine, nous ne sommes jamais vraiment dépaysés. Marc Riboud est un acharné du détail. Toujours le détail adéquat et fédérateur. Toujours ce petit plus qui nous permet de capter en un clin d’œil l’atmosphère, baignée de lumière et de quotidienneté. Il saisit LE moment, décèle un regard, une émotion, un geste pris sur le vif. L’instant parfait. Donner une universalité à l’intime, c’est là tout l’art de Marc Riboud.
« Si tu ne sais pas parler, peut-être pourras-tu regarder. C’est important de savoir voir » lui aurait dit un jour son père. Marc Riboud, passionné d’actualité, a été un témoin privilégié des évènements des cinquante dernières années. Il a vu et a su transmettre son témoignage à travers des images poignantes et criantes de vérités. Sans fioriture. J, comme Joie. La joie d’une jeune Algérienne lors de la proclamation de l’indépendance de son pays. A, comme amies, trois minuscules petites Chinoises se tenant cahin-caha par l’épaule. F, comme Fenêtre, fenêtre sur l’âme de chaque individu qui fixe naturellement l’objectif. I, comme Imiter, un jeune garçon mimant la pose du photographe. M, comme maman, une jeune indienne à moitié nue, au regard lointain et résigné. Marc Riboud ne triche pas.
L’éloge du quotidien
Prendre le temps de s’asseoir, attendre et observer la vie. « Découvrir des rimes et des rythmes dans mon viseur est encore un immense plaisir » aime-t-il dire. Marc Riboud est en fait un poète. Parce que finalement, la poésie c’est quoi ? Faire l’éloge d’objets et d’évènements communs à travers un regard sensible et attentif. Hisser au rang d’œuvres d’art les petites choses de la vie. Tracer des parallèles entre notre société et celle de l’autre, avec comme fil conducteur, la vie dans ses plus simples et parfois cruels apparats. L’artiste, d’une empathie sans borne, (même à des milliers de kilomètres) nous révèle l’individu ordinaire dans son quotidien. Et c’est cela qui nous rapproche.
15 décembre 2010 – 30 janvier 2011Maison Européenne de la Photographie – http://www.mep-fr.org/
5/7 rue de Fourcy – 75004 Paris
Métro: Saint Paul ou Pont Marie
Bérengère Guy
I comme Imiter Chine, 2002 © Marc Riboud
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