L’objet de cet article est de montrer en quoi les services fournis par internet peuvent être des outils anti-démocratiques s’ils font leur apparition maintenant dans les arènes politiques africaines comme c’est déjà le cas sur d’autres continents.
Illustration de la faible utilisation des médias sociaux au Burkina Faso
De nos jours, les média sociaux offrent aux acteurs et aux institutions politiques, ainsi qu’à la population, des possibilités d’interaction novatrices. A travers le monde, plusieurs exemples montrent comment Facebook, Twitter, youtube, Flickr… sont utilisés dans l’arène politique pour les besoins politiques. Les hommes politiques, pour ne citer que ceux qui ont des « comptes vérifiés » sur le site de minibloging Twitter (Barack Obama, Dmitry Medvedev, Hugo Chavez, Stephen Harper…) ont découvert dans les médias sociaux virtuels le moyen de diffuser des messages politiques, de découvrir les domaines d’intérêt et les besoins des électeurs et de la population en générale, de recueillir des fonds et de constituer des réseaux de soutien.
Hommes politiques possédant un compte Twitter vérifié
En Afrique, la question de l’utilisation des médias sociaux par les hommes politiques se pose autrement. Avant de la clarifier je vous propose la lecture de l’écrit qui a suscité en moi la rédaction du présent billet. Il a été rédigé par un co-auditeur de l’émission Atelier des Médias de RFI lors de la préparation de l’émission n°134 qui avait pour thème: Faut-il avoir peur de Facebook. Son commentaire disait ceci:
J’ai connu le moyen le plus facile de rassembler les hommes des coins les plus éloignés dans les idées et les philosophies sur Facebook …exemple: au Cameroun, je suis sur que Paul Biya, et tous ses opposants politiques peuvent donner a chaque camerounais le chemin a suivre pour les élections présidentielles de 2011 en s’exprimant pour la première fois sur une même plate-forme et sans passion puisque chaque camerounais puisera dans les écrits des uns et des autres assez d’éléments pour disqualifier ou pour adopter tel candidat. mon souci est de convaincre le peuple camerounais a voter une loi pour tenir en obligation tous ceux qui désirent gouverner au Cameroun ou avoir un rôle public à se manifester tous les jours sur Facebook et surtout a répondre aux préoccupations des groupes de régions (Douala ,Yaoundé….) dans un programme mensuel ( fin de mois) …depuis que ce réseau existe …les présidents de pays devraient s’en servir pour rendre compte de la gestion des hommes et des ressources dont ils ont la charge…les nations unis devraient radier les pays qui ne l’utilisent pas ou donner des délais assez courts pour se conformer a cette norme de gouvernance par internet / Facebook qu’on peut appeler : governbook.com …
La beauté apparente de cette proposition s’explique par le fait qu’elle ne tient pas compte des réalités de bon nombre de pays africains.
Le faible taux d’alphabétisation en Afrique:
L’alphabétisation est «l’acquisition des connaissances et des compétences de base dont chacun a besoin dans un monde en rapide évolution [et] un droit fondamental de la personne humaine.»1. En plus simple cela consiste en la capacité de lire et décrire dans une langue cruciale à votre société. De nos jours ces compétences sont nécessaires pour l’utilisation des services de réseaux sociaux qu’offre internet, savoir lire et écrire est capital pour utiliser Twitter, Facbook etc.
Les pays africains, en l’occurrence les pays de l’Afrique de l’Ouest affichent les taux d’analphabétisme les plus élevés au monde. selon une étude, intitulée « From closed books to open doors – West Africa’s literacy challenge » [Des livres fermés aux portes ouvertes – Le défi de l’alphabétisation en Afrique de l’Ouest]. Soixante-cinq millions d’adultes ouest-africains – soit 40 pour cent de la population adulte – ne savent ni lire, ni écrire. Sur les 10 pays qui affichent les plus faibles taux d’alphabétisation du monde chez les adultes (15 ans et plus), sept (07) se trouvent en Afrique de l’Ouest : le Bénin, le Burkina Faso, la Guinée, le Mali, le Niger, le Sénégal et la Sierra Leone, peut-on lire dans le rapport.
Dans ces conditions comment voulez qu’ils participent aux débats politiques qui se passent sur le net? Comment?
Le faible taux de pénétration des TIC en Afrique:
La plupart des pays africains affichent un taux d’accès aux services TIC extrêmement faible, comparativement au reste du monde. Ainsi, si l’on considère l’indice NRI (Networked Readiness Index) élaboré par le Forum Economique Mondial et l’INSEAD, qui mesure le degré de préparation d’un pays à tirer parti des TIC efficacement, les pays d’Afrique se classent mal. Selon l’édition 2009-2010 de ce rapport, la Tunisie est en tête de la trentaine de pays africains pris en compte : elle se classe au 39ème rang mondial et devance l’île Maurice (53ème mondial), l’Afrique du Sud (62ème), l’Egypte (70ème), le Sénégal (75ème ) la Gambie (77ème), le Botswana (86ème), le Maroc (88ème mondial) la Namibie (89ème) le Kenya (90ème) le Mali (96ème) la Zambie (97ème) le Ghana (98ème), le Nigeria (99ème) la Mauritanie (102ème) le Sénégal (99ème) la Lybie (103ème) la Côte d’Ivoire (103ème), le Lesotho (107ème), le Burkina Faso (108ème), le Bénin (111ème), l’Algérie (113ème), l’Ouganda (115ème), le Mozambique (116ème), le Malawi (119ème), la Tanzanie (120ème), le Madagascar(121ème) l’Ethiopie (122ème), le Cameroun (128ème), le Burundi (129ème), le Zimbabwe (132ème) et enfin le Tchad, 133ème.
Le faible taux d’utilisation d’internet en Afrique:
Pour le cas spécifique d’internet, le site « Perspectives Economiques en Afrique » compile des données économiques issues de la Banque Africaine de Développement, du Centre de Développement de l’OCDE, de la Commission Économique des Nations Unies pour l’Afrique, ainsi que celles d’un réseau de think tanks et de centres de recherche africains. Selon les données qu’il publie, l’Afrique affiche le plus faible taux de pénétration d’Internet dans le monde. En Afrique subsaharienne, le taux de pénétration d’Internet est de 7% et celui du Haut débit de 1%. De façon isolé le Burkina Faso a un taux d’utilisation d’utilisation de 0,9% selon la dernier estimation Internet usage statistics for africa.
Avec un tel taux d’utilisation d’internet, combien de citoyens africains peuvent participer aux débats politiques qui se mènent sur internet, précisément sur les réseaux sociaux? Combien?