Alors comme je me suis dit que je ne pouvais pas vous parler que des églises non plus, je me suis donc dit que j'allais vous parler cette fois-ci d'une rotonde. En fait, comme déjà mentionné dans diverses publies, des rotondes romanes, il en reste 3 de bouts debout à Prague, celle de St Martin à "Vyšehrad", celle de St Longin (à l'origine St Etienne, cf. ma publie), et celle de la Ste Croix mineure, que je m'en vais vous en parler de aujourd'hui. Je l'avais déjà souvent mentionnée dans plusieurs publies aussi, mais j'attendais d'en avoir quelques photos de l'intérieur avant d'un faire un article complet, ce qui prit un peu de temps, compte tenu du fait (souvent mentionné toujours) que les églises de Prague (en dehors des 5 plus courues) sont plutôt fermées qu'ouvertes. Certes, cela va un peu à l'encontre de la volonté d'à bon dieu, mais chaque gérant est libre de conduire sa franchise comme il l'entend, aussi ici, les maisons d'à bon dieu sont ouvertes à tous, sauf lorsqu'elles sont fermées. Ma patience fut cependant récompensée, puisque grâce à la rave party organisée début décembre 2010 par le curé de la paroisse pour la St Nicolas des petits enfants, j'ai pu m'introduire dans le lieu saint et prendre quelques clichés. Hourra...
L'origine du nom ("Rotunda sv. Kříže Menšího" Ste Croix mineure, mais aussi "Rotunda nalezení Sv.Kříže" découverte de la Ste Croix) vient de la fameuse découverte de la Ste Croix (parfois appelée "Vraie Croix", par opposition aux copies made in China) faite par Ste Hélène, mère de l'empereur Constantin, un matin du 3 mai 326 alors qu'elle grattait le sol se sa canne à la recherche de truffe noire du père Igor à Jérusalem (lisez l'histoire détaillée dans wikipédia). L'édifice tchèque fut curieusement appelé Ste Croix mineure, afin de ne pas le confondre non pas avec les (au moins) 2 autres églises de la Ste Croix, celle de "Na příkopě" (Prague 1) et celle de "Žižkov" (Prague 3), mais pour ne pas le confondre avec l'église de la Ste Croix majeure, la vraie, celle que Jésus découvrit la passion dessus, l'église aujourd'hui disparue du monastère des croisés au coeur rouge ("Ordo crucigerorum cum rubeo Corde", d'origine PLonaise) à la limite de la ville juive.
Eh oui, parce que selon la légende, le nom de "Ste Croix mineure" proviendrait d'une autre croix que celle de Jésus passionné. Le nom proviendrait de qu'il était une fois, il y a long-longtemps très longtemps, au tout début de la ville de Prague, alors que cette dernière n'était encore qu'un magma de cahutes primitives en bois, habitées par des païens vivant de la chasse et de la cueillette, en ce temps donc, il était une fois une jeune fille (un peu bête) qui voulut prendre pour foi la religion chrétienne, considérée alors comme hérétique par les populations locales polythéistes. Les parents comme les voisins essayèrent en vain de l'en dissuader (la jeune fille), que Jésus, Marie, Joseph, c'était bien loin des "Perun, Dažbog, Mokoš et Svarog" adorés par les ancêtres, et que malgré la puberté, le hachich et Facebook à la télé, fallait qu'elle arrête ses conneries et revienne dans le droit chemin du paganisme. Mais rien n'y faisait, l'entêtée voulait le baptême sur la tête comme l'âne le coup de pied au cul. Alors une fois convertie, les parents de la petite sotte fabriquèrent fissa une croix improvisée, et le soir d'une nuit obscure sans lune profitant de l'opacité des ténèbres tout noirs, ils clouèrent la nigaude dessus, et jetèrent le tout dans l'étang qui se trouvait là en ces temps, mais plus maintenant. Le lendemain, le miracle se produisit. La croix flottait debout sur l'eau de l'étang, le macchab mort en proue, comme si une force mystérieuse soutenait ce funèbre tableau hors des flots. Alors les rustiques vidèrent l'étang, enterrèrent la crucifiée selon le rite catholique qu'ils avaient googlé auparavant pour savoir comment faire, et remblayèrent le tout de gravats afin que le morbide machin ne remonte plus à la surface les nuits de pleine lune lorsque les loups hurlent leur désespoir dans le zoo de Prague. Plus tard, c'est sur cet emplacement que l'on construisit notre rotonde de la Ste Croix mineure. Et plus tard encore, au XVII ème siècle, lors des restaurations de la rotonde, les archéologues (encore que, au XVII ème siècle les archéologues n'avaient pas encore été inventés) découvrirent dans leurs fouilles une vraie croix en bois, toute pourrie, sous les fondations de l'édifice (cf. "Jan Florián Hammerschmidt, Prodromus gloriae Pragenae (1723): Die 12. Maji, in hac Ecclesiola sub terra inventum est magnus Crucifixus.").
Il est une autre hypothèse, concernant le nom. Vous vous souvenez, dans ma publie sur St Longin, je vous avais parlé (et même dessiné) de comment notre rotonde se trouvait au centre de gravité des 3 cathédraléglises (St Guy, St Pierre et Paul à "Vyšehrad" et St Pierre "Na Poříčí"). Ben tracez maintenant une droite St Guy - St Longin, puis une autre droite St Clément - St Philippe et Jacques. Vous obtenez une croix (mineure) dont les branches mesurent 2400 m chacune, et dont le centre est matérialisé par la rotonde de la Ste Croix (mineure). Enorme non? Certains historiens émettent l'hypothèse qu'avec toutes ces figures géométriques, la rotonde de la Ste Croix mineure était le centre de l'urbanisation de la vieille ville depuis le XII ème siècle, jusqu'à la mort du bon roi Charles IV (soit quelques 200 ans). Que tous les plans qui naquirent, tenaient compte d'une certaine façon des zazimuts, des points car dits no, des solstices, des emplacements des églises existantes comme à construire, etc... et que tout ce schéma mystico-religio-reliefo-urbanistique avait son point central en notre rotonde de la Ste Croix mineure. Les sceptiques prétendent quant à eux, qu'avec le nombre d'églises dans Prague, on peut créer n'importe quelle figure, y compris Bart Simpson avec la rotonde comme nombril au milieu. Ah oui, parenthèse. L'église St Clément, c'est celle de "Na Poříčí", rue "Klimentská", près du premier monastère des dominicains (vers 1226), parce que j'en connais au moins 3, d'églises St Clément dans Prague. Quant à St Philippe et Jacques, sur "Arbesovo náměstí", elle datait de la seconde moitié du XII ème siècle mais fut démolie entre 1891-1892 pour faire place à un troquet somme toute correct, dans lequel je me rends parfois compte tenu de sa proximité d'avec chez-moi (on y mange relativement bien).
Il est cependant indéniable que notre rotonde est l'un des plus anciens édifices religieux de Prague, et l'un des plus anciens édifices tout court encore debout. Son origine incertaine remonterait parfois au XI ème siècle, d'après la découverte lors des fouilles, d'un denier du prince "Jaromír" de 1012. Son origine remonterait plus probablement au début du XII ème, puisque les historiens subodorent que la rotonde aurait été construite après l'effroyable inondation de 1118 comme église seigneuriale affiliée à un domaine, seigneurial (cf. "Cosmas Pragensis, Chronica Bohemorum: Anno dominice incarnationis MCXVIII. Mense Septembri tanta fuit inundatio aquarum, quantam non reor fuisse post diluvium in orbe terrarum. Nam noster iste fluvius Wlitaua repente preceps erumpens de alveo, ah quot villas, quot in hoc suburbio domus, casas et ecclesias suo impetu rapuit! Aliis namque temporibus tametsi hoc raro evenit, ut unda alluens vix tabulata pontis tangeret, hec autem inundatio altius quam X ulnis super pontem excrevit."). On remonte aussi l'origine encore plus près de nous, parce que des fragments de carrelage datés univoquement du 3 ème quart du XII ème siècle ont été retrouvés lors des fouilles archéologiques. Mais aucune facture ne démontre qu'il s'agit du pavement d'origine, donc la rotonde peut facilement être plus ancienne. Mais pas forcément non plus. Quoi qu'il en soit, aucune année ni aucun nom ne permettent d'en identifier l'origine avec certitude (cf. "Jan Florián Hammerschmidt, Prodromus gloriae Pragenae (1723): Haec ecclesia S. Crucis aedificata in forma rotunda nullum fundatoris sui nomen, nec annum fundationis declarat"). La rotonde se trouve sur l'ancienne route commerciale qui menait (entres-autres) du château de Prague vers le château de "Vyšehrad", juste derrière les ponts (respectivement Judith puis Charles) qui traversaient le fleuve "Vltava", 200 m derrière l'église "sv. Jana Na Zábradlí" de la même époque et sur cette même artère, démolie (l'église) en 1896. Selon les archéologues toujours, la rotonde se trouvait à proximité d'un marché international, de par les noyaux de dates et les poils de yacks trouvés enfouis dans le sous-sol.
La première mention écrite de la Ste Croix mineure remonterait à 1365 ("ecclesia sancti Crucis minoris in Maiori civitatem"), l'édifice étant alors église paroissiale. J'ai retrouvé une mention encore plus lointaine, dans les archives du monastère de "Zbraslav", lorsque le conseil de la vieille ville confirma en 1380 un édit de 1343 concernant la location aux moines d'un édifice en face de notre rotonde: "quod a relig. d. abbate et conv. mon. Aule Regie matura deliberacione pluries prebabita domum eorum cum area in Maiori civitate Prag. ex opposito ecclesie s. Crucis minoris sitam penes balneum". Non, je plaisante, le texte originel (de 1343) était possiblement rédigé différemment, par exemple sans référence à la Ste Croix mineure. Ensuite, plus grand chose d'intéressant. En 1625, la rotonde passe sous la gérance des dominicains près de St Gilles ("klášteř dominikánů u sv. Jiljí")... Parenthèse toute fraîche. Mi-janvier 2011, je me suis rendu tout excité à "l'exposition" organisée par les moines (les dominicains près de St Gilles) intitulée "Hic Sunt (domini) Canes". Première surprise, samedi on ne peut pas photographier. Mais dimanche, après changement du jeune pubère marchand de ticket, on peut (photographier). Ah ouais? Seconde surprise, y a rien à voir. Mais alors quand je dis rien, c'est vraiment rien. C'est bien simple, j'avais mon appareil photo avec moi, j'avais l'autorisation de photographier, et pourtant je n'ai fait que maigres clichés, juste à peine de quoi pouvoir dire j'y étais. C'est tout du blabla sur St Dominique, sur les dominicains, sur le monastère et son histoire, les fouilles archéologiques... mais en terme d'exposition, d'objet historique, rien. Un grand vide sidéral. Et pourtant, il y a au minimum l'église St Gille, fabuleuse de peintures baroques. Ou la bibliothèque, baroqu'aussi. Ben non, fermées, et hors programme de l'exposition (ben tiens). Alors attention, je ne dis pas que l'histoire des dominicains à Prague, que l'histoire du monastère St Gilles, que c'est pas intéressant. Si, bien sûr. Y a juste que chacun peut lire ça de chez soi, au chaud, une bière à la main, et qu'il n'y a pas besoin de monter une exposition pour ça. Bon, bref, donc si vous passez à côté, z'êtes pas obligés de vous y arrêter, "hic est nihil". Parenthèse sur l'humour dominicain. "Dominicain" est bien sûr basé sur (saint) "Dominique", mais aussi sur le jeu de mot latin "domini-canes", littéralement les chiens du seigneur (de "dominus" et de "canis"). En fait, le clébard joue un rôle prépondérant dans la "culture dominicaine" (cf. la vision de la maman de St Dominique). Il symbolise la vocation de l'ordre, qui consiste à "aboyer la parole sainte, et protéger le troupeau de brebis débiles". Et l'ordre s'en donna à coeur joie durant son existence, d'aboyer et de mordre (cf. l'implication des dominicains dans les croisades contre les cathares, la liquidation des templiers, des sorcières, l'inquisition, etc...). Quant à "Hic sunt leones" (ici se trouvent les lions), il s'agit de la mention portée sur les anciennes cartes pour désigner la "terra Incognita". Du coup "Hic Sunt (domini) Canes", ben jeu de mots rigolo. Super l'humour dominicain non? Super pour un ordre qui répandit pendant plusieurs siècles des hectolitres de sang innocent au nom de la religion catholique.
Alors donc en 1625, la rotonde passa sous la gérance des dominicains près de St Gilles. Bon, on ne sait pas grand chose sur cette période, sinon qu'il y eut quelques restaurations comme indiqué sur une plaque en marbre retirée au XIX siècle, mais dont Jean Florian (à nouveau) nous fit une description complète: "Jan Florián Hammerschmidt, Prodromus gloriae Pragenae (1723): Super porta hujus Ecclesiolae sequens Bohemica extrinseca continetur inscriptio renovationis: Anno 1673. Haec ecclesia renovata est in honorem gloriam DEI, expensis Domini Joannis Gedliczka, vulgo: Moravi, vel Morawecz illius Uxoris. Circa Ecclesiam muros renovavis, tegi fecit. Intus dealbari, in propylaeo tectum, ossarium contegi curavit. Anno 1674. extrinsecus Ecclesiam incrustari, dealbari, in choro tectum apponi, ad Coemeterium novam portam, intus gradus, pergulam ad campanas fieri pavimentum novum sterni curavit". En gros, ça dit qu'en 1673, un certain "Jan Jedlička" (dit "le Morave") fit réparer à ses frais les murs, le toit et l'église, blanchir l'intérieur et restaurer l'ossuaire. En 1674, il fit crépir et blanchir l'église (du dehors?), couvrir le choeur (d'un toit), faire poser porte neuve au cimetière... enfin il fit mentionner tout le tralala qui va bien, afin de le pointer du doigt à St Pierre le moment viendu.
En 1784, Josef II désacralisa la rotonde (comme plusieurs milliers d'autres religieuseries d'ailleurs) dans le cadre de ses grandes reformes. Elle passa sous propriété privée en 1789, se transforma en entrepôt, en charbonnerie (magasin de vente de charbon) et commença une méchante déchéance qui mena l'édifice à la ruine. En 1860, la rotonde se trouvait dans un tel (sale) état, que la municipalité envisageait de la raser purement et simplement, afin de construire sur son emplacement un immeuble de rapport. Mais en 1861 arriva Zorro, sous l'apparence de ce qui deviendra en 1863 "Umělecká Beseda", une association d'artistes et d'intellectuels rassemblés sous la devise "la liberté dans les arts" dont la vocation était (et est toujours) la promotion de talents, et accessoirement la sauvegarde des rotondes en péril. C'est ainsi que sous l'impulsion de "Ferdinand Břetislav Mikovec" puis de "Josef Mánes", le conseil municipal acquit la rotonde (alors bien privé), tandis que l'architecte "(Vojtěch) Ignác Ullmann" ("Lichtenštejnský palác", "Palác Lažanských" -café Slavia-, la cine à gogues est spagnole...) offrit de la restaurer gratuitement. Lors des travaux, en 1864, l'on découvrit dans la chapelle 140 bractéates (vieille pièces de monnaie en forme de bouton), une pierre tombale et un macchab. Historiquement c'est sans grand intérêt, mais je vous le signale quand même, afin que ma publie soit complète :-) Ensuite il y eut des suggestions pour la réfection, en particulier de la décoration intérieure, et "Josef Mánes" réalisa même une aquarelle de son dessein (en 1865), sur le thème des légendes entourant les saints patrons de la Bohême. Malheureusement son état mental commença à se détériorer sérieusement (sans doute la syphilis ou la tuberculose du cerveau). Il entreprit cependant un voyage d'étude à Rome dont il fut précipitamment ramené (par sa frangine), encore plus louftingue-amoché qu'avant son départ, et devint pour ainsi dire inutilisable (il s'était croûté dans les escaliers de la fontaine de Trevi, au point qu'il en perdit connaissance). Il décéda en 1871 d'acinésie (selon le médecin légiste), et outre son active collaboration à la sauvegarde de notre rotonde, il légua la grille en fer forgé comme témoignage concret de sa diligente implication. Cette clôture néoromantique de 1865 aux motifs d'églantine, qui sépare la parcelle de terrain rotondesque de la voie publique, est encore visible aujourd'hui (cf. mes photos). Et n'oublions pas non plus de mentionner les autres artistes qui contribuèrent à la décoration, comme "Soběslav Pinkas", "Petr Maixner", "Jan Popelík", ou "Bedřich Wachsmann", pour ne pas oublier de mentionner que les plus célèbres. En 1876, la rotonde parfaitement restaurée fut rendue au conseil municipal. Mais par manque d'utilisation, d'aération, et de soin, la plupart des artefacts en bois, en métal ou en peinture datant de cette époque finirent à la poubelle. A noter que lors de cette restauration, les éléments baroques furent retirés afin de rendre à la rotonde son aspect roman d'origine. Une autre restauration mineure intervint en 1927, et la dernière restauration générale d'entre 1975 et 1980 donna à l'édifice l'apparence sous laquelle vous pouvez le voir aujourd'hui.
Et justement, ben il ressemble à quoi aujourd'hui l'édifice? Il se compose d'une nef centrale ronde d'un diamètre de 6 m, et d'une abside à l'Est en demi-cercle de fer à cheval. La nef est chapeautée d'une coupole, surmontée d'un fanal (lanterne?). L'abside est percée de 3 fenêtres datant de la restauration 1860-65. D'extérieur en fait, rien d'exceptionnel. D'intérieur, en fait pas grand chose non plus, sinon les restes de fresques du XIV ème siècle, datant sans doute du règne de Charles IV (le bon roi) et représentant pour l'une (au Nord) l'adoration des rois mages, la vierge Marie à droite, Jésus sur ses genoux. L'on devine encore un bout de Joseph, et l'on suppose un troupeau de saints au-dessus (mais on ne les voit plus). L'autre fresque (au Sud) représente le couronnement de la vierge, 2 anges en bodyguards sur les flancs, et une construction de type italien complète la scène en arrière plan. Ces peintures furent découvertes lors des réparations de 1860-65, et restaurées par un maître du genre, "František Sequens".
Alors quelques anecdotes maintenant. Lors de la période de sauvegarde de la rotonde, en 1862, "Ferdinand Břetislav Mikovec" se souvint soudainement que le musée du Royaume de Bohême avait acquis 20 ans plus tôt le "fameux modèle de Prague" (dont je vous ai souvent parlé) construit par "Antonín Langweil". Du coup on exposa le modèle à la mairie de la vieille ville, et la recette de l'expo servit en (petite) partie à payer les frais de restauration de l'édifice. Je vous ai mis une photo de la version digitalisée du modèle, mais comme on ne peut malheureusement pas se promener à sa guise dans le modèle (déplacement imposé par la camera), je n'ai pas de meilleure vue que celle que vous voyez-là. Ensuite, j'ai réussi à vous trouver quelques esquisses/peintures d'époque ("Mánes, Bubák, Lorenz"), montrant la rotonde (d'époque). Il s'agit de photos de photocopies de documents digitalisés par la bibliothèque municipale de Prague, aussi la qualité n'est pas top-moumoune. Cependant l'on peut quand même se faire une bonne idée d'à quoi ressemblait l'édifice à l'époque. Aujourd'hui, la rotonde sert d'église paroissiale à la "communauté vieille-catholique" de Prague. Alors attention, "vieille-catholique" (i.e. l'église d'Utrecht) n'a rien à voir avec son ancienneté, mais avec l'attachement au dogme originel de l'église catholique, en opposition avec le 1er concile du Vatican (1870) et surtout en opposition avec le principe d'infaillibilité pontificale (encore une [parmi les nombreuses] église schismatique sur le sol de Bohême :-)
Et n'oublions pas les légendes qui vont bien. En un temps, il existait dans la rue "Konviktská", juste derrière la rotonde, un troquet malsain nommé d'après le pseudonyme de son propriétaire, "U Jezurů", et que les praguois appelaient ironiquement "U Dobrých sester" (chez les soeurs charitables) de par les boucanières noctambules qui écumaient ce pince-culs interlope. Et l'histoire raconte, que le coin était hanté par un esprit poilu, avec de longues jambes et de longs bras, tout poilus, et une barbe, toute poilue aussi. Selon les dires des locaux, le bestiau venait punir les dépravés pervertis qui s'étaient égarés de la parole divine. Nombreux affirment l'avoir vu, l'esprit poilu, et d'aucuns même auraient été mordus au nez, jusqu'à une pauvrette (enfin dévergondée quand même) que le bestiau aurait tenté d'étrangler. A force d'effrayer les clients, ces derniers finirent par ne plus fréquenter le troquet, et l'esprit poilu aurait alors déménagé son vertueux apostolat en d'autres localités de la ville. Personnellement, je ne l'ai jamais rencontré, sans doute parce que je suis moralement respectable :-) Par contre, je me suis déjà rendu au troquet qui porte son nom, "U Chlupatýho ducha" (à l'esprit poilu), et qui ne mérite pas forcément un coup d'oeil, même si vous passez dans le coin. Les serveuses sont mignonnes, sympathiques, mais la bière est catastrophiquement immonde. Un imbécile d'exposition universelle a placé le fût dans la cuisine, et la pipette au le bar, éloigné d'une dizaine de mètre. Or tout le monde sait qu'une des règles fondamentales du tirage de bière, c'est d'avoir les tuyaux les plus courts possible, afin que la bière n'y séjourne pas. La bière à "l'esprit poilu" est imbuvable, aussi je vous déconseille l'endroit.
Sinon il est une croyance selon laquelle, il existerait sous la rotonde et dans la rue "Konviktská", de profondes caves dans lesquelles se trouveraient des tombes, dans lesquelles dormiraient des morts vivants qui protègeraient un fabuleux trésor consigné là pour le prochain roi de Bohême. Cette légende serait étayée par la découverte du denier de "Jaromír" (de 1012). Maintenant compte tenu de l'inflation accumulée depuis 1 millénaire et de la probabilité d'avoir un roi dans l'avenir, quand bien même il remontait un jour à la surface, la valeur du dérisoire trésor...
Toujours dans la rue "Konviktská", dans un jardin privé, son propriétaire (du jardin) voulut construire un mur afin de séparer sa parcelle de celle de la rotonde. Mais la branche d'un arbre encombrait l'érection (du mur), aussi il (proprio) prit une scie, et entreprit de couper la branche importune. Soudain, l'entaille se mit à saigner de vrai sang, tout rouge et tout impossible à laver en machine sans y rajouter du chocolat, du vin rouge et de l'huile de vidange... Alors notre gars prit peur, et fit venir une entreprise de maçonnerie pour terminer le boulot. Il demanda cependant aux ouvriers d'éviter l'arbre, et d'ériger un arc dans le mur autour de la branche, afin de la laisser telle quelle. Cette curiosité pour les passants était encore visible avant la restauration de la rotonde du XIX ème siècle, et le remplacement dudit mur par la clôture néoromantique aux motifs d'églantine designed by "Josef Mánes". Aux dernières nouvelles, l'arbre serait décédé de mort naturelle, et ne s'y trouverait plus non plus.
Donc lorsque vous visiterez Prague, plein centre, n'oubliez pas de passer voir la rotonde. Elle se trouve à seulement 250 m du Théâtre National, dans des petites rues authentiques qui sentent bon l'histoire de la ville, et vous ne serez pas importunés par les touristes qui ne s'aventurent que rarement dans ce coin-là. Peu de chance que la rotonde soit ouverte, cependant vous pourrez toujours au moins en apprécier l'extérieur. Et une fois la visite terminée, je vous invite vraiment à vous rendre au caboulot dit "Auprès de la rotonde". Les choses ont un peu changé depuis ma publie (de Septembre 2006), mais l'essentiel est toujours là, intact et authentique. Du bonheur en vrac ma brave dame. La Ste Croix c'est là: 50°4'58.132"N, 14°24'53.021"E