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Les médias dans la mire d’Apple

Publié le 04 février 2011 par Mac Québec

Pierre Duhamel est journaliste depuis plus de 30 ans. Il observe de près et commente l’actualité économique québécoise depuis 1986. Il possède son blogue et écrit également sur le site de L’actualité.  C’est avec son autorisation que nous reprenons son billet qui a été initialement publié sur L’actualité.

C’est un peu Guillaume Tell à l’envers. Au lieu de viser la pomme, c’est la pomme qui cible les producteurs de contenus. Hier, c’étaient les majors de la musique, aujourd’hui ce sont peut-être les médias imprimés.

Voici l’enjeu.

Les éditeurs de journaux et de magazines ont salué la venue du iPad comme on attend un sauveur. La tablette numérique mettrait fin à l’érosion de leur tirage et leur permettrait de faire du rattrape auprès des jeunes générations. Fini les factures d’impression et de distribution, les journaux pourraient enfin de « dématérialiser ». Contrairement au support papier, il est possible d’y intégrer de la vidéo, et, plus que dans le Web, on a plus le sentiment de parcourir une édition spécifique.

Il y a plus encore. Après avoir donné leur contenu sur le Web, les médias ont vu l’occasion de racheter cette bévue historique et d’imposer un prix d’abonnement à leurs lecteurs. La gratuité est un charmant concept, mais produire de l’information de qualité coûte cher. Le iPad était vu comme un nouveau canal de distribution qui permettait aux médias de mettre les compteurs à zéro et de recommencer à neuf leur vie numérique.

Apple a une autre logique. Ce canal de distribution, il s’appelle le iTunes. C’est un magasin. On y achète de la musique, des films, des émissions et des applications pour les IPad, iPod et iPhone, comme on achète des livres sur le iBook ou des logiciels sur l’Application store. Un concurrent, Amazon, est lui aussi un magasin et on y vend aujourd’hui à peu près n’importe quoi.

Quelle est la logique commerciale d’un magasin ? Il distribue vos produits et il prend une marge ou une commission sur ce qu’il vend. Un dépanneur prend une marge sur le prix des journaux, du litre de lait ou d’essence. Pour Apple, c’est clair comme de l’eau de roche.

Les éditeurs ne voient pas ça de la même façon. Pour eux, Apple se retrouve dans une situation d’abus de position dominante. Ce sont en tout cas les mots utilisés par des enquêteurs belges qui aimeraient amener la cause à la Commission européenne. Position dominante, parce que Apple contrôle 75 % du marché de la tablette numérique. Abus, parce qu’elle impose ses règles du jeu et que les éditeurs ne sont pas en position de marchander.

Le Monde parlait d’une commission de 30 %, ce qui aurait un impact sur la rentabilité des médias. Demain, cette commission pourrait être de 40 % et les éditeurs se retrouveraient devant un fait accompli. Pire, en contrôlant le processus de A à Z, Apple prive les éditeurs de leur actif le plus précieux : la liste des abonnés. Quand il établit le prix d’un média, un acheteur potentiel regarde deux choses : la rentabilité et  l’abonnement. Un annonceur est prêt à payer à payer davantage pour un journal ou un magazine dont le tirage est élevé et payé.

Apple garde le mutisme pour le moment. Elle se sait en position de force et ne fait aucun cadeau. Son propre modèle d’affaires comprend des revenus importants tirés des téléchargements de contenus culturels ou informatiques.

Mais comme dit le dicton anglophone, il faut être deux pour danser. Si tous les journaux boudent la plateforme d’Apple pour épouser celles de Google et de Microsoft, le iPad risque de perdre des adeptes. Apple n’aura pas le choix de négocier, mais ce sera un partenaire difficile.

Source de l’image : istockphoto


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