… Ou le petit livre rouge : le retour …
Où les choses se compliquent c’est quand ces intéressants jeunes gens se lancent dans l’innovation ou prétendue telle. L’idée de supprimer le quotient familial pour le remplacer par une allocation fixe ne date pas non plus d’hier. Des esprits aussi distingués que ceux de Messieurs Saez, Landais et Picketty, n’ignorent certainement pas que, sur cette question, le long terme de la raison démographique s’oppose au court et au moyen terme de la raison fiscale ce qui n’a pas permis, jusqu’à aujourd’hui, de trancher le débat avec assurance.
Il faut donc chercher ailleurs une idée neuve et, malheureusement, on finit par la trouver ce qui est d’autant plus aisé que Ribouldingue, Filochard et Croquignole (2) n’en sont pas peu fiers. Je résume soit deux contribuables touchant exactement le même salaire moyen dans une PME du centre de la France et doués tous deux d’une femme et de deux enfants de même âge. Pour la commodité de la démonstration et en hommage à Jean de la Fontaine le fabuliste bien connu, nous appelerons nos sujets, Monsieur Cigale et Monsieur Fourmi. Contrairement à ce que son nom peut laisser penser, Monsieur Cigale est quelqu’un de prévoyant. Un plan d’épargne logement alimenté régulièrement au fil des années, grâce à une stricte gestion des ressources familiales, lui a permis d’acquérir un coquet pavillon, labellisé développement durable et basse consommation. Il vient de finir de rembourser le prêt souscrit au moment de l’achat. Son collègue, Monsieur Fourmi, a fait le choix de rester locataire ce qui était son droit le plus strict. Moyennant quoi, pendant que Monsieur Cigale partait en vacances quinze jours à La Chaux du Sauveur (Haute Saône), Fourmi découvrait les îles Seychelles (Océan Indien). Si l’ordinateur du second s’ornait d’une pomme entamée, le premier ahanait sur une machine d’origine aussi chinoise qu’incertaine et quand Madame Fourmi faisait les soldes à la Halle ou chez Farfouille, elle ne croisait jamais Madame Cigale occpée à la même activité mais dans des enseignes plus prestigieuses.
Résultat des courses : Au jour d’aujourd’hui, Monsieur Fourmi paie toujours son loyer (revalorisé annuellement comme le prévoit son contrat sur la base d’une formule qu’il serait trop long de recopier ici) et Monsieur Cigale NE PAIE PLUS RIEN. Justement révolté par cette injustice criante et pour rétablir la sainte égalité qui doit régner entre les citoyens d’une grande démocratie (patrie des Droits de l’Homme de surcroît) nos révolutionnaires fiscaux émettent une idée brillantissime. Puisque ces salopards de propriétaires occupent des appartements et des maisons qui, certes, leur appartiennent, mais pour lesquels ils ne paient pas un fifrelin, ils proposent d’ajouter à la somme des revenus déclarés au fisc par ces privilégiés, le loyer qu’ils devraient payer si leur logement ne leur appartenait pas.
On peut certes regretter que le trio n’ait pas osé pousser sa rréflexion jusqu’au bout. Pourquoi par exemple, ne pas avoir songé à ajouter à la déclaration des revenus, la différence entre le coût du transport domicile travail selon qu’il est réalisé en RER ou en Rolls Royce, ou encore les économies réalisées par un ménage qui se nourrit à domicile avec des aliments achetés et préparés par ses soins au lieu de fréquenter, comme il le pourrait, et peut-être le devrait, le trois étoiles Michelin le plus proche ?
Du temps des Romains, deux astrologues ne pouvaient, disaient-on, se regarder sans rire. Aujourd’hui quand vous apercevez, à la sortie de la Bourse ou de Science-Po, deux individus qui, immédiatement après s’être croisés, se livrent à une hilarité incontrôlée, vous pouvez parier sans risque qu’il s’agit de deux économistes.
Chambolle
(1) Dans une interview parue dans le journal Marianne du 29 janvier dernier
(2) Pour ceux dont la mémoire défaille , ce sont les patronymes des Pieds Nickelés
(3) Dans l’interview citée plus haut