En Tunisie, les habitants des régions mobilisées depuis décembre contre le régime de Ben Ali, région de Kasserine et de Sidi Bouzid, et qui ont subi le plus la répression des semaines sanglantes de janvier ne décolèrent pas, « Non au vol de la Révolution ! » scandaient les manifestants il y a quelques jours à Sidi Bouzid. En effet, si la tête du pouvoir est en fuite, ses sbires sont toujours en place, et les tunisiens de ces régions ne se leurrent pas sur les manipulations visant à étouffer leur contestation via remaniement ministériel ou milices armées, ils continuent d’exiger la démission du gouvernement de transition et de Ghannouchi, premier ministre qui assure la présidence en intérim. Ces habitants en lutte depuis plus d’un mois, ont organisé une « caravane de la liberté » jusqu’à Tunis, où le 23 janvier ils se sont installés sous des tentes, à la Casbah, devant le siège du gouvernement, pour maintenir leurs revendications contre la dictature et la précarité. Depuis leur présence, ils ont fait face à une répression continue. Le 28 janvier l’attaque violente de la police pour les évacuer a fait plus d’une quinzaine de blessés, et certaines sources parlent de plusieurs morts à l’issue de courses poursuites dans les rues de Tunis. Un enfant de 17 ans originaire de Regueb (région de Sidi Bouzid) est porté disparu. 29 jeunes ont été arrêtés et torturés, et sont passés au Tribunal le lendemain samedi 30 janvier, pour entrave à la circulation, coups, et jets de projectiles, ils ont finalement été libérés en attendant la délibération. Si depuis le départ de Ben Ali la police n’avait pas usé de gaz lacrymogènes, cela n’aura pas duré longtemps, l’Etat policier montre de nouveau son visage ! Stop à la répression !
Les milices armées des partisans du RCD continuent leurs exactions. La CNT-F dénonce l’existence et les actes de ces milices qui poursuivent leur terreur, de même nous dénonçons l’occupation des locaux régionaux des syndicats de l’UGTT le 25 janvier 2011 à Monastir et Béja et les tentatives d’occupation pour ceux de Gafsa par ces milices. La CNT-F apporte tout son soutien aux habitants toujours en lutte pour obtenir satisfaction !
L’Algérie connaît elle aussi depuis janvier des révoltes populaires de la jeunesse dans différentes régions, contre la vie chère mais aussi comme en Tunisie pour un renversement du régime. Les manifestations continuent, l’état d’urgence est toujours en vigueur, les tentatives d’immolations d’habitants en désespoir ne font que se répéter. Le 22 janvier Alger était complètement assiégée. Samedi 30 janvier c’est encore plusieurs milliers de personnes qui sont descendues dans les rues de Béjaïa en Kabylie. Une coordination nationale pour le changement et la démocratie en Algérie (qui regroupe des associations, syndicats, partis politiques) s’est créée il y a quelques jours pour mener un front uni contre le régime de Bouteflika : d’ores et déjà une marche est appelée le 12 février pour la levée de l’état d’urgence et pour faire tomber le régime ! La CNT-F s’oppose à tous les moyens qu’use l’Etat Algérien pour étouffer et réprimer la contestation, en ce sens nous dénonçons fermement les pressions directes de la Di ection des Renseignements et de la Sécurité que subit le SNAPAP (syndicat autonome des personnels de l’administration publique qui fait partie de cette coordination) depuis ces derniers jours !
Que ce soit ici, en Tunisie, en Algérie, et ailleurs, libertés syndicales !
L’écho de la révolte du peuple tunisien a raisonné jusqu’en Egypte ! Depuis le 25 janvier se sont des centaines de milliers et largement plus d’un million aujourd’hui 1er février au Caire et dans d’autres villes qui réclament le départ de Moubarak au pouvoir depuis 1981 !
Comme les révoltes du bassin minier de Gafsa en 2008 pour la Tunisie, l’Egypte a connu un épisode de mobilisation précédent marquant : les révoltes de Mahalla, aussi en 2008, parties au départ de la grève des travailleurs d’une usine de textile appartenant à l’Etat égyptien, puis qui se sont étendues massivement et sur de longs mois, avec comme revendication principale une augmentation des salaires face à la vie chère, sont significatives. En effet si aujourd’hui le peuple égyptien réclame la chute du régime et le départ du président, c’est aussi, et surtout, comme en Tunisie et en Algérie un mouvement populaire dans la continuité des expériences de 2008, pour la liberté d’expression, de meilleures conditions de travail, et contre la précarité !
La vitesse et l’ampleur de la mobilisation est impressionnante, mais celle de la répression aussi : si en Tunisie le bilan catastrophique des morts en janvier s’élevait à environ 200 en plusieurs semaines, en Egypte, au bout de trois jours seulement on compte déjà 300 morts.
La stratégie militaro-sécuritaire et la répression féroce associée, et ce avec l’ingérence de la France et des Etats Unis dans les différents pays est inacceptable ! En nommant le 30 janvier, à la place de vice-président, Omar Suleiman, chef des services de renseignements égyptiens depuis plusieurs décennies, et bien sûr proche de ses confrères européens et israéliens, Moubarak ne fait que confirmer ses orientations mais aussi ses inquiétudes face à la force de la contestation populaire. Car malgré la coupure du réseau internet et téléphonique, les tirs à balles réelles et les tueries, les arrestations et tortures, et la complicité des puissances occidentales à la dictature de Moubarak, le peuple égyptien reste mobilisé et poursuit comme en Tunisie son élan révolutionnaire !
La CNT-F réaffirme son soutien aux peuples Tunisien, Algérien et Egyptien en luttes, dénonce la répression dont ils sont victimes, et exige l’arrêt des arrestations et tueries, la libération de tous les prisonniers et l’arrêt des poursuites à leur encontre ! Aussi la CNT-F dénonce une fois de plus les positions néo-coloniales et complices de la France, de l’Europe et des Etats Unis. Stop à l’ingérence ! Autodétermination des peuples !
La CNT-F appelle à rejoindre les initiatives locales de soutien aux mouvements populaires actuels en Tunisie, en Algérie et en Egypte et ceux qui suivront dans cet élan ! El pueblo Unido Jamas Sera Vencido !
Solidarité Internationale !
Le groupe de travail Afrique du Secrétariat International de la CNT-France.
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Confédération Nationale du Travail (CNT) :