Profitant de l'entrée en vigueur des directives européennes SEPA, qui favorise la création de nouveaux acteurs du paiement, les 3 principaux opérateurs mobiles français (Bouygues Telecom, Orange et SFR), associés à Atos Worldline (spécialiste des plates-formes de paiement), annoncent la création d'une entreprise commune, Buyster, qui proposera une nouvelle solution de paiement en ligne d'ici quelques mois.
Pour la plupart des journalistes qui se sont empressés de relayer l'information, l'objectif serait de créer un "PayPal à la française". Autant le dire tout de suite, je suis, pour ma part, sceptique face à ce projet...
D'un point de vue opérationnel, Buyster adopte effectivement un modèle proche de celui de PayPal. Les clients des opérateurs devront en effet ouvrir un compte et associer à celui-ci, de manière totalement sécurisée, les informations de leur carte bancaire. Lorsqu'ils souhaiteront payer, il leur suffira de saisir leur numéro de mobile (au lieu de leur adresse de messagerie, dans le cas de PayPal) et leur code secret pour valider la transaction sur leur carte.
Dans la SA porteuse du projet (détenue à parts égales par les 4 entreprises associées), les opérateurs apportent leur clientèle (et on peut supposer que celle-ci sera fortement incitée à adopter leur moyen de paiement) alors qu'Atos fournit la plate-forme technique (d'intermédiation), ainsi que l'intégration du paiement Buyster dans sa solution de paiement en ligne (soit 30 000 commerçants en ligne sur son offre SIPS et sur Merc@net de BNP Paribas).
Les avantages mis en avant par les promoteurs de Buyster rappellent également la communication de PayPal : meilleure ergonomie et plus grande facilité de paiement, renforcement de la sécurité du e-commerce... Mais les choses commencent à se gâter quand le communiqué insiste sur sa cible privilégiée des paiements sur mobile tout en mettant en avant la sécurisation des paiements en ligne grâce au mobile de l'utilisateur, ce qui manque singulièrement de cohérence (le mobile comme facteur supplémentaire d'authentification n'a pas de sens s'il sert également de support du paiement)...
Par ailleurs, rien n'est dit des coûts du service, qui seront un critère important pour séduire les commerçants (et faire face à la concurrence), mais dont on peut craindre qu'ils resteront élevés en raison du support du paiement (la carte bancaire) et de la cupidité à laquelle nous ont habitués les opérateurs.
Après leurs multiples expérimentations de paiement sans contact sur mobile, leurs solutions de type kiosque (SMS surtaxés), leur initiative MPME pour les micro-paiements (qui l'utilise ?), et maintenant avec Buyster, les opérateurs veulent couvrir tous les secteurs du marché. Mais ont-ils une réelle stratégie pour convaincre les consommateurs et les commerçants de l'adopter et pour différencier leur offre de celles qui sont déjà bien établies (PayPal en tête) ou de la multitude de solutions émergentes ? Ce n'est pas l'impression que donne cette annonce...
Détail "amusant" : à l'heure où j'écris ces lignes, mon navigateur Firefox m'informe que le site www.buyster.fr a été signalé comme "page contrefaite" (l'adresse buyster.fr, aboutissant, elle, à une page d'information) !