La dernière fois que j'ai voulu acheter ce petit opuscule, à la librairie "La Procure", on m'a dit qu'ils étaient en rupture de stock. Quelques semaines plus tard, je le trouve à la FNAC, sans doute réimprimé dans l'urgence, car ce petit livre de 32 pages avec ses annexes est le best-seller du moment.
La question étant : pourquoi un tel succès ? Est-ce à cause du prix de 3€, à cause de la personnalité de l'auteur et de son âge - 93 ans - de son courage et de ses engagements antérieurs...ou des idées qu'il a choisi de développer, de façon quelque part révolutionnaire, comme au temps des libelles, sur papier ?
Sans doute un peu de tout cela. A croire que personne ne raisonne plus par lui-même....et que la plupart des lecteurs ont zappé les cours d'histoire et de philosophie. Alors, les leçons d'un vieux sage sont toujours bonnes à prendre.
Que dit Stéphane Hessel ? Qu'il nous faut retrouver les valeurs fondatrices de la Résistance dont le motif de base était l'indignation. Certes. A l'époque, le motif d'indignation était tout à fait tangible : l'horreur du totalitarisme nazi, de la Shoah, un peu plus tard du stalinisme. Ce serait aujourd'hui la même chose ici, chez nous ?
S. Hessel nous rappelle qu'il y a deux visions possibles de l'histoire de l'humanité : celle qui, avec Hegel, dit que le sens de l'histoire est la liberté de l'homme progressant étape par étape. L'histoire est faite de chocs successifs, c'est la prise en compte de défis. L'histoire des sociétés progresse, et au bout, l'homme ayant atteint sa liberté complète, nous avons l'Etat démocratique dans sa forme idéale.
Mais il existe une autre conception de l'histoire. Les progrès faits par la liberté, la compétition, la course au "toujours plus", cela peut être vécu comme un ouragan destructeur. C'est la conception du philosophe allemand Walter Benjamin.
pour ma part, mais vous me direz que mon opinion n'a aucune importance, je me retrouve résolument dans la première de ces attitudes.
Je souscris pleinement à l'indignation de Stéphane Hessel contre la politique de l'actuel gouvernement israëlien envers les populations palestiniennes, même si j'imagine qu'il n'a pas d'autre choix. Sauf celui de la non-violence, à la manière de Martin Luther King ou Nelson Mandela, comme l'auteur la préconise comme seule solution au conflit. Il dit aussi qu'il ne faut pas laisser s'accumuler trop de haine....N'est-on pas arrivé à un point de non-retour ?
S'indigner ne suffit pas. C'est un début, certes, mais nous sommes mal placés pour nous indigner efficacement. Notre seule manière d'agir est dans notre bulletin de vote. Il nous faut mesurer à l'aune de ce qui se passe en Tunisie, en Egypte, notre infini privilège.
Et je ne suis pas du tout d'accord avec la conclusion de Stephane Hessel : les moyens de communication de masse sont une chance pour la démocratie. Car aujourd'hui, la pensée et la parole de chacun ne peuvent plus être contrôlées comme avant.
Indignez-vous, manifeste de Stephane Hessel, Indigènes éditions, 32 p. 3€