Pourquoi s'intéresser encore aujourd'hui à la vieille fête de la Chandeleur, héritière de la fête celtique d'Imbolc ?
C'est la documentation irlandaise qui livre le plus de détail sur cette antique tradition, mais c'est dans tout le monde celtique qu'elle était célébrée : les Gaulois la désignait probablement par le terme Ambivollos.
Tout, le peu de traces de la phase antique comme ce que nous savons de l'Irlande, porte à croire qu'Imbolc était une fête de purification-fécondité, comme il en existait d'autres dans l'Europe antique, notamment à Rome (Lupercalia), à la mi-février. En effet, Imbolc signifie "lustration", rite de purification lors d'un changement de période. Pourquoi cette fête importante, à peine un mois après le Solstice d'hiver ?
Pour deux raisons complémentaires : d'une part, le début du mois de février est le moment où l'on peut facilement constater que le soleil se lève plus tôt et se couche plus tard, les journées sont déjà agréablement plus longues, l'hiver paraît déjà vaincu ; d'autre part, c'est le moment où commencent les agnelages et où reprend la traite des brebis, animal dont on sait l'importance dans le système agraire du monde celtique [1]. C'est donc une fête liée à un cycle agricole, plus qu'une fête solaire, et ce bien qu'elle soit le pendant hivernal de Lugnasad.
De plus, la déesse Brigitt (Brigitte) présidait la fête [2] : déesse de la fécondité, du blé, de la poésie, elle aidait également les femmes en couches (les brebis également ?). Comme son équivalente romaine Diane et son équivalente grecque Artémis, peut-être présidait-elle aussi à la lumière lunaire (lumière féminine), et fut-elle mise en rapport avec la première lune de l'année, qui a pu servir de référence pour fixer Imbolc/Ambivollos.
Certes, peu de Gaulois aujourd'hui s'occupent encore d'élevage et de brebis. En revanche, nous vivons encore sous le soleil de la Keltia, qui doucement daigne à nouveau éclairer nos pâles visages. Les crêpes que nous prenons plaisir à manger lors de la Chandeleur ne rappellent-elles pas la lune de Brigitte, la première de l'année ?
Nous savons tous que le printemps reviendra, il revient déjà et rien ne l'arrêtera. La Chandeleur, dans cette course permanente qu'est la vie moderne, doit nous offrir le temps d'y songer et de mesurer les prodigieuses perspectives qu'ouvre ce simple constat : quoi qu'il arrive, le printemps revient.
[1] P. Méniel, Chasse et élevage chez les Gaulois, éditions Errance, Paris, 1991, a bien montré que le mouton est le principal mammifère d'élevage dans la Gaule celtique, bien avant les bovins et les porcins.
[2] Dans le calendrier catholique irlandais, Sainte Brigitte est fêtée le 1er février.
Amaury Piedfer.