Pascale KRAMER - Un homme ébranle : 4-/10

Par Eden2010

Pascale KRAMER – Un homme ébranlé : 4-/10

Vous avez envie de vous ennuyer pendant quelques heures et de sortir du temps gâché avec une sensation de malaise ? Ce livre est pour vous ! Le thème – lourd – est desservi par le style – dense – et une passion de la description – pénible – pour un résultat dépourvu d’âme – et un vague sentiment d’écœurement.

L’histoire est celle de Claude, un homme d’une cinquantaine d’années, qui a eu deux enfants de mères différentes et vit désormais avec Simone, avec laquelle il n’a pas eu d’enfants et qui est son épouse depuis dix ans.

Atteint d’un cancer en stade terminale, il affronte sa fin mais également les débris de sa famille éclatée.

Au début de ce petit roman il faut d’abord s’habituer à la lourdeur de l’écriture ; j’ai mis bien deux voire trois pages avant de comprendre ce qui se passait : Claude fait la connaissance de son fils Gaël, onze ans, qu’il a eu d’une relation précédente avec Jovana. Il n’avait jamais rencontré le garçon auparavant et Gaël semble aussi mal à l’aise que nous dans l’environnement multidétaillé.

Très rapidement, on s’aperçoit que Claude n’est pas satisfait, ni de lui, ni de sa vie, ni même de sa progéniture. Et pourtant, le bref contact avec Gaël semble le mettre en face de sa vie, voire de ses responsabilités envers elle. Est-ce pour cela qu’il décide, finalement, d’entreprendre un traitement contre le cancer plutôt que de se laisser mourir comme il l’avait prévu ?

Nous donc voilà avec Claude qui décide enfin de se soigner alors qu’il avait imposé sa mort prochaine à ses proches qui s’y étaient préparés.

Et Gaël, qui vient passer deux semaines auprès de son père, sa femme et sa maladie.

L’ensemble est décrit du point de vue de Simone, celle qui partage la vie de Claude ainsi que sa déchéance physique et qui doit maintenant s’accommoder de l’enfant d’une autre.

Et curieusement, alors que je pense que le but était de faire apparaître Claude comme un homme dur et désemparé face aux regrets de sa vie et de plaindre la vie difficile de Simone, j’ai surtout retenu le manque d’humanité voire même la cruauté de cette dernière. Je ne suis pourtant pas certaine que tel était le but de l’auteur.

Car on s’aperçoit à quel point Claude est seul. Loin de se réjouir et de le soutenir dans son choix d’entreprendre une chimiothérapie, d’espérer quelques mois de plus avec lui, Simone et même son fils adulte Cédric lui en veulent. Pourquoi ? De vouloir vivre ? De rêver de guérison ?

Simone en particulier prend très mal la maladie et les effets du traitement. Est-elle jalouse parce que c’est la rencontre avec Gaël qui a convaincu Claude de se battre contre la maladie ? Est-elle effrayée par la souffrance du traitement ? Pour ma part, j’ai trouvé sa réaction incompréhensible. Elle semble se dégouter, ellen’apporte aucun soutien à l’homme qui voit naître un espoir. Car qui dit traitement dit nécessairement espoir ! Elle le laisse se débattre avec sa maladie, l’observant de façon écœurée.

La maladie n’a pas séparé le couple Claude/Simone ; ils étaient déjà bien loin l’un de l’autre pour en arriver à préférer la mort prochaine à la vie grâce au traitement !

Je n’ai pas réussi, mais pas du tout, à me glisser dans la peau de Simone. Je n’ai rien ressenti pour ce personnage central, je n’ai pas vu sa souffrance. Elle m’a juste laissé un léger gout de mépris. 

Maintenant, chacun retient d’un livre ce qu’il souhaite et chacun le comprend à sa manière. Ce n'est pas parce que je n'ai pas aimé le caractère central que je donne une faible note à un livre. Mais il y a un autre point que je n'ai pas du tout aimé : le style d’écriture.
Ce n’est pourtant pas un de ces styles modernes aux phrases incomplètes que j’abhorre. Non, ici, les phrases sont soignées, la grammaire parfaite, les mots choisis avec méticulosité, les images colorées. Seulement, tout est si dense, on a l’impression d’avancer à travers de la boue sur le point de sécher, une surface déjà dure sur de la mélasse collante.

Et oui, dans ce livre la souffrance n’est pas seulement dans la maladie de Claude, non, on la retrouve dans la plume de l’auteur. Oui, Pascale Kramer se donne beaucoup de mal à choisir ses mots, c’est exact. Mais elle n’atteint pas son but. Les images et scènes, les sentiments décrits, tout se mélange dans une pâte indigeste, aucune scène ne se déroule devant notre œil intérieur, aucune odeur semble flotter dans l’air. Et malgré ses efforts strictement aucune émotion ne transpire entre les lignes qui traitent pourtant d’un sujet grave !

Le style, surchargé et pénible, aurait gagné à être aéré, ne serait-ce que visuellement, au moyen de quelques simples « à la ligne » de plus !

Pour exemple, lorsqu’il y a des conversations, rien ne démarque les phrases lancées à l’un par l’autre, le tout est intégré dans un bloc solide de descriptions. L’émotion y est écrasée et même l’histoire, parfois, semble tomber dans le gouffre du trop plein. L’accident de la voiture devant la maison, par exemple, et bien, quoi ? Certaines scènes auraient méritées plus d’attention, d’autres à être coupées. Bref, pour moi, j’aurais suggéré de retravailler l’ensemble.

De tous ces mots pourtant sélectionnés avec amour je ne retiens pas le combat contre la maladie ou les efforts fournis afin de vivre avec Gaël pendant quelques semaines.

Je ne retiens que l’image d’une femme froide qui survit à un récit linéaire et descriptif, tellement linéaire qu’aucune présentatrice de télévision ne serait pas parvenue à rester aussi neutre.

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