Chine qui inquiète, Japon qui s'éveille

Par Benard

Publié le 31/01/2011

Tokyo.

Passage par une librairie : en tête des ventes, une nouvelle traduction simplifiée de Friedriech Nietszche, deux millions d’exemplaires , suivie d’un manuel de management du Californien Peter Drucker. Qui les lit vraiment ? Le critique litteraire Akiyama Yasuo m’explique qu’il s’agit de livres totémiques : le premier est supposé fournir des recettes de bonheur individuel contre une société vécue par les jeunes  Japonais comme trop conformiste ( d’où aussi le goût pour les déguisements , les jeux de rôle). De Drucker, une idôle au Japon, on espère des conseils d’enrichissement. Du bonheur et de l’argent pour des jeunes Japonais que la relative stagnation angoisse mais qui disposent toujours du plus haut pouvoir d’achat au monde.

Mais des nuages nouveaux s’accumulent qui parviennent de Chine.

L’opinion publique  japonaise s’est brutalement retournée contre la Chine depuis l’ agression, l’automne dernier, d’un garde-côte japonais par un chalutier chinois dans les eaux territoriales contestées de Sendaku. L’ événement est à rapprocher des deux attaques militaires perpétrées l’an dernier par  la flotte nord-Coréenne contre des miltaires et des civils sud Coréens.

Ce retournement contre la Chine n’était pas inscrit d’avance car la Chine jouit en Asie du prestige culturel de la civilisation mère, comme Rome et Athènes pour les Européens. Les échanges économiques intenses dans la région, où les circuits de fabrication sont  tous imbriqués, satisfont en principe tous les partenaires : mais une  vraie cassure est survenue en 2008. On s’interroge à Tokyo ou Séoul, sur la nouvelle agressivité chinoise et sur la création d’une marine de haute mer , un porte-avion en particulier (prévu pour 2013) qui n’est pas une arme défensive.

Kato Hideki, économiste et penseur influent du Japon contemporain (président deTokyo Foundation) n’est pas loin de se réjouir de cette menace chinoise : « Les Japonais , dit-il, spontanément hédonistes, ne sortent jamais de leur complaisance que lorsqu’ils sont menacés. »

De fait , les Japonais et les Sud-Coréens d’ordinaire complaisants envers la Chine , envisagent maintenant une stratégie de « containment » , économique d’abord, militaire si nécessaire. Les entreprises japonaises  regardent vers l’Inde et le Viet-Nam , les Sud-Coréens de même. Une vaste alliance de zone échange et de démocratie , le Trans Pacific Partnership, pourrait réunir toutes les démocraties riveraines du Pacifique, moins la Chine qui n’est pas candidate : l’objectif est économique mais pas seulement. Les forces d’autodéfense du Japon, encore tournées vers une agression théorique de la Russie, réorientent leur strategie vers le sud-ouest du pays, au plus proche de la Chine : c’est là aussi que croise la 7e flotte américaine. La défense japonaise manoeuvre conjointement avec la marine australienne et à terme, la réconciliation avec la Corée du Sud encerclerait la Chine.

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