Le 29 janvier 2011
Objet :
« Vous avez dit "philosophe" » ? ! »
Monsieur André Glucksmann
Aux bons soins du quotidien
Le Monde
80, boulevard Auguste Blanqui
75013 Paris
Monsieur,
Votre article publié le 27 décembre dernier dans le quotidien Le Monde sous l’intitulé « Cessons de diaboliser roulottes et mosquées ! », et portant en signature votre patronyme suivi du qualificatif « philosophe », me donne, non seulement une excellente occasion de vous rappeler mes lettres des 4 février 2002 et 26 juillet 2005, toujours sans réponse à ce jour, mais surtout de vous récuser, une fois de plus, le statut usurpé de « philosophe » pour les raisons déjà avancées dans l’abondant courrier antérieur ainsi que pour la teneur superstitieuse de l’écrit dénoncé aujourd’hui – et ce, aussi longtemps que vous n’aurez pas avancé votre argumentation contraire, intellectuellement et philosophiquement étayée, sur des points très précis de désaccord !
Certes, vous n’êtes pas la seule des soi-disant « élites » de l’époque, tous milieux confondus [Médias, personnel politique, intelligentsia (prétendus intellectuels ou pseudo-philosophes) et associations moralisatrices à sens unique], à fonctionner, pour votre plus grand profit, sur les mensonges et les « croyances au miracle » du penser superstitieux humain dans ses divers modes d’expression : religion, métaphysique matérialiste, ou scientisme, et idéaliste, ou pseudo-spiritualisme, idéologie et moralisme – sauf à vous-même ou à quiconque, et notamment la centaine de faiseurs d’opinion dénoncée depuis plus de dix ans, d’établir le contraire, comme je l’attends vainement depuis lors.
Ainsi, à en juger par cet article et votre parcours idéologique hétéroclite, passant du maoïsme de votre jeunesse au soutien de Nicolas Sarkozy à l’élection présidentielle de 2007, vous ne semblez échapper à aucune des formes du penser superstitieux.
Vous l’affichez déjà en volant au secours de la superstition musulmane, au prétexte d’ « islamophobie », ou « stigmatisation de l’islam », porteuses de vos condamnations moralisatrices partisanes. En effet, sans le démontrer une fois de plus ici, mais comme je l’ai établi more geometrico dans mes lettres accusatrices sans ambiguïté adressées notamment au Parti socialiste, à Bernard-Henri Lévy et au MRAP, j’affirme qu’un philosophe, ou prétendu tel, qui vole au secours de la superstition religieuse en général et de la superstition musulmane en particulier, c’est tout sauf un philosophe, c’est un « philosopheur » qui a tout à apprendre de la philosophie, de la « vraie » philosophie : celle démontrée par Spinoza notamment pour établir que LA Vérité ne peut-être qu’UNE, Unique, puisque, selon Socrate, tout est UN, le créateur et la création, la cause et l’effet, nous-mêmes et le monde.
Et ceci suffit à invalider toutes les croyances superstitieuses en la possible coexistence de « deux » absolus, à savoir notre monde ET un Dieu, ou un principe, créateurs (primus motor, Premier agent, et big-bang, entre autres). En effet, deux absolus qui coexisteraient, en étant à la fois, tous les deux, infinis, éternels, parfaits et immuables - sauf à ne pas être absolument absolus ! -, c’est une impossibilité absolue par définition. Mais il est ne vous est pas interdit, évidemment, de démontrer le contraire !
D’ici-là (?!), j’en viens à vos condamnations moralisatrices partisanes sur fondement de dogmes religieux, puisque visant à dédouaner l’islam de ses tares et autres turpitudes, en oubliant des réalités toujours bien concrètes d’aujourd’hui, qui le rendent incompatible avec le catéchisme soi-disant universel contemporain, ou Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948, à travers des pratiques telles que la charia, véritable atteinte au principe d’égalité, et la fatwa, qui ne vise pas moins à limiter la liberté d’expression tout au moins !
Mais bien d’autres mœurs ancestrales, qui perdurent, devraient faire hurler d’indignation les soi-disant bienpensants d’aujourd’hui, à votre exemple, pour dénoncer d’autres pratiques archaïques, telles que la lapidation des femmes, la pendaison des homosexuels, les mariages forcés, fut-ce de fillettes, les crimes d’honneur, y compris en France, et des châtiments barbares d’un autre âge (flagellation et amputation, entre autres), sans oublier les conflits interreligieux, entre sunnites et chiites, avec leur guerre Iran-Irak des années 80 et ses centaines de milliers de victimes, ainsi que les attentats musulmans meurtriers, perpétrés ici et là dans le monde, mais inspirés par l’islam, que vous le vouliez ou non – sauf à vous-même, évidemment, de démontrer que l’islam et son Dieu n’y sont pour rien !
Et c’est pourtant au nom de « ÇA » que vous vous autorisez à couvrir d’opprobre vos concitoyens, qui dénoncent ces atteintes au catéchisme droit-de-l’hommiste ! C’est précisément parce qu’il se fonde uniquement sur des fictions que je parle de catéchisme, ou de religion des droits de l’homme, puisqu’il vise à décréter le Bien et le Mal absolus sur Terre, alors que tout est relatif dans notre monde – mais, en « philosopheur », ou bien vous l’ignorez - un comble ! -, ou bien vous préférez le taire !
Ainsi, dans un monde où TOUT est relatif, c’est-à-dire où tout comporte du pour et du contre, du positif et du négatif, des avantages et des inconvénients, entre lesquels tranchent seulement les intérêts égoïstes contradictoires, individuels et collectifs, des uns et des autres, certains « vertueux autoproclamés » croient pouvoir transposer l’Absolu dans le relatif, l’Idéal dans le quotidien. Étonnez-vous, après cela, que ce catéchisme ainsi que tout autre, qu’il soit religieux ou idéologique, se caractérise surtout, et seulement, par son inobservation réellement universelle - et ce jusqu’à la fin des temps, sauf à vous-même ou à quiconque, évidemment, de démontrer le contraire !
Un véritable philosophe ne saurait ignorer ce mot de Spinoza, invalidant à jamais la croyance superstitieuse en un Bien et un Mal absolus, puisqu’il a déclaré :
« Nous ne désirons pas une chose, parce qu’elle est bonne (absolument bonne, ou bonne « en soi »), c’est parce que nous la désirons que nous la jugeons bonne. »
Spinoza suffit ainsi à ôter l’ « absoluité », leur caractère absolu, à toutes nos valeurs humaines, y compris celles qui fleurissent au fronton de nos mairies et autres édifice publics. C’est pourtant sur cette « foutaise » d’absolu que les divers camps antagonistes, les tenants du Bien absolu et ceux du Mal absolu, s’affrontent sur les sujets les plus variés, comme il en va chez nous, aujourd’hui, en interdisant l’euthanasie, tandis que d’autres pays européens voisins ont pris des mesures contraires, témoignant aussi, à leur façon, de la « relativité » universelle dans notre monde humain.
A SUIVRE...