Un soir de conférence aux Archives départementales du Nord

Publié le 28 janvier 2011 par Lommedesweppes
« Courbe ta tête, fier Sicambre. Brûle ce que tu as adoré et adore ce que tu as brûlé. » S'il n'y avait eu cet épisode du baptême de Clovis, fondateur de la nation française dans la mémoire collective, l'histoire eût-elle gardé le souvenir de la reine Clotilde, son épouse ? En effet, en ces âges obscurs où les quelques hommes qui savent lire et écrire, rédigent, pour les hommes, les annales d'une société du haut Moyen Âge dominée par les hommes, il est bien difficile d'en extraire des informations pour raconter l'histoire de la vie de cette sainte. C'est un exercice, basé sur « Les Livres d'Histoires » de Grégoire de Tours, qui s'apparente davantage à du calcul de probabilité mathématique qu'à un récit biographique balisé de certitudes. C'est pourtant ce défi qu'a relevé pour nous Emmanuelle Santinelli-Foltz, maître de conférences en histoire médiévale à l'université de Valenciennes, qui, en ce jeudi 20 janvier, dans la salle de conférences des Archives départementales du Nord, devant une quarantaine d'auditeurs attentifs, s'est attachée à rassembler des sources éparses pour tenter de reconstituer son existence.
Une existence aux contours flous : elle serait née entre 475 et 480, serait morte entre 544 et 548, et aurait donc vécu entre 64 et 73 ans, un âge vénérable pour l'époque. Sa vie se déroule dans un univers géopolitique instable : toute l'Europe de l'Ouest est en mouvement. Les rois Francs descendent de Belgique vers le sud de la Gaule, les Burgondes remontent du sud vers l'ouest, tandis que dans les péninsules italienne et ibérique sont installés les Ostrogoths et les Wisigoths.
Clotilde est connue pour être la nièce du chef burgonde Gondebaut qui l'éleve après l'assassinat de ses deux parents. Elle acquiert le statut de « regina » de par son mariage avec Clovis. On ne sait pas grand-chose d'elle. Signe d'un temps où la condition de la femme est considérée comme faible dans un univers masculin dominateur, son histoire, telle qu'elle est racontée par Grégoire de Tours, ne retient sa présence qu'à trois moments : la naissance de ses fils, la conversion du roi, la mort du roi.
Pourtant, ces récits laissent transparaître une femme au caractère affirmé, qui imposera le baptême de ses deux premiers fils avant d'obtenir celui de son époux. Elle innovera en offrant une image soudée du couple royal, qui se concrétisera avec la basilique des Saints Apôtres à Paris, qui abritera leur tombeau commun. Malheureusement, les sources ne nous permettent pas de cerner plus précisément son influence.
Clotilde survivra plus de trente années à Clovis. Elle est alors décrite comme « une veuve pieuse dans le siècle qui réside à Tours (patrie de Saint-Martin) tous les jours de sa vie ». Elle s'occupe de nombreuses fondations religieuses. On sait peu de choses sur la régence qu'elle dut exercer pendant la minorité de ses fils puis à leur âge adulte. On devine cependant son obsession : éviter qu'une guerre civile n'éclate entre eux.
Tout cela est bien peu, me direz-vous. Et je le concède volontiers. D'une part, en l'état des connaissances, il est difficile d'en dire plus. D'autre part, le meilleur moyen d'enrichir votre savoir sur ces sujets qui vous intéressent reste de venir nous rendre visite un soir de conférences aux Archives départementales du Nord, d'écouter nos conférenciers et de dialoguer avec eux autour du verre de l'amitié. Vous serez toujours les bienvenus.