Pour résumer, Lust, caution ressemble sur le papier à une version asiatique du somptueux Black book de Paul Verhoeven. Mêmes enjeux et mêmes thématiques, pour un résultat diamétralement opposé. Ang Lee foire consciencieusement chacun des aspects d'une intrigue qui aurait dû fasciner sous tous les plans. Le film à suspense, avec espionnage risqué et tentatives de meurtre? Raté. On ne tremblera jamais, la mayonnaise du thriller ne prenant définitivement pas. La romance torturée, avec espionne en herbe tombant peu à peu amoureuse du monstre qu'elle observe? Non plus, tant les stéréotypes affluent et l'harlequinisation prend de l'ampleur. Quant au film érotique promis, il constitue sans doute le pan le plus médiocre du film, avec ses scènes de baise (ne parlons pas d'amour) proprement consternantes. On pense à une version amateur de Basic instinct, autre grand film de Verhoeven dans lequel le réalisateur érigeait le sexe en révélateur de nos parts d'ombres les plus dissimulées.
La mise en scène paresseuse et désuète de Lee n'aidera pas vraiment à transcender un propos qui descend toujours plus bas dans le stéréotype et le déjà-vu. Le comble du comble est atteint à l'occasion d'une scène se déroulant dans une bijouterie, où la psychologie féminine est réduite à l'attrait pour les diamants et où Tony Leung, comme exaspéré par un personnage ni fait ni à faire, se met à grimacer sans raison, mettant à mal vingt ans d'une carrière élégante et flegmatique. C'est ce qu'on appelle un beau gros raté ; on fait confiance à Lee pour que cela ne soit qu'un accident de parcours.
2/10