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Extension du domaine de la figure (Tony Cragg au Louvre)

Publié le 28 janvier 2011 par Marc Lenot

elbow.1296221128.jpgMieux vaut entrer par le bas de la Cour Marly, au Louvre, pour jouir le mieux des sculptures de Tony Cragg (jusqu’au 25 avril) ; en effet, la première sculpture que l’on voit alors, Elbow, est faite dans un bois clair lamellé qui semble appartenir au même univers que les statues antiques qui l’environnent.  Ce n’est alors pas une confrontation entre classique et contemporain auquel nous sommes conviés, mais au contraire un jeu de réponses et de correspondances, une tension entre statique et dynamique, entre pose (pause) et mouvement.

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Plus haut dans la Cour Marly, face à l’immuable Neptune de Coysevox dont le trident pourrait le transpercer, on voit ce monstre noir en bronze, comme un cancer, qui est en fait la jonction de deux mains gigantesques, se tordant et se désarticulant. Leur surface est couverte de signes hiéroglyphiques, lettres grecques et symboles divers, comme un ancrage de cette membrane dans la culture (Manipulation).

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Dans la Cour Puget voisine, les Captifs de Desjardins répondent à Ferryman, sculpture vaguement anthropomorphique en bronze où le regard perce la surface, où l’externe devient l’interne comme dans une transformation de Moebius. L’opposition entre ce vide et ce plein, entre cette verticalité et ces hommes au sol, entre cette incertitude sur le dedans et le dehors, et cette solidité du réel est particulièrement réussie. Un lecteur expert en fonderie saur-t-il expliquer comment cette sculpture a été réalisée, sachant, dit l’artiste sans révéler son secret de fabrique, qu’elle a été fondue ainsi, sans perforations ultérieures.

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Enfin, l’œuvre emblématique de cette exposition, réalisée  spécialement pour l’occasion et qui restera en place jusqu’à octobre 2011, est placée sous la Pyramide de Pei, sur un socle qui avait été conçu à ces fins, mais n’avait jusqu’ici jamais été occupé (on avait pensé, m’a-t-on dit, y placer la Victoire de Samothrace). Face à ce défi impressionnant, Tony Cragg a réalisé une sculpture en bois rouge de 3 mètres de haut, comme un soleil, comme un noyau nucléaire, Versus. Peut-être est-ce la couleur, peut-être la forme trop peu géométrique, trop contournée dans cet univers de verre et de métal, mais j’ai été un peu déçu. Il me semble que, pour cet endroit unique, on pouvait espérer mieux.

Il n’en reste pas moins que l’exposition dans les deux cours, au milieu des statues éternelles, de ces formes dynamiques, énergiques est une réussite tant pour l’œil que pour l’esprit, réflexion sur la sculpture, questionnement de la forme humaine, « extension du domaine de la figure ». Excellente initiative du Louvre (encore que le lien avec Messerschmidt paraisse ténu), même si un grognon patrimoniolâtre se plaignait de ce que le Musée  s’abaisse à exposer des œuvres qui soient à vendre…

Photos de l’auteur. Tony Cragg étant représenté par l’ADAGP, les photos seront ôtées du blog à la fin de l’exposition ; la photographie de Versus sera ôtée en octobre 2011.


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