Des indices auraient du nous alerter. Mathilde Seigneur et ses sorties fracassantes sur le talent de chanteur de Claude Barzotti et son amour des paupiettes, Eric Zemmour et ses petites phrases provoc sur la peine de mort ou la colonisation, le come back de « Tournez manège » et « Champs Elysées » qui nous rappellent nos crises d’acné juvénile, le retour de la cuisine de bistro et son cortège de vol au vent et autres œufs en gelée. Et même le fameux Barbour revient hanter nos penderies. Inutile de le nier, le réac est de retour. Le réac assumé, décomplexé, voir même branché. Et comble du comble parce qu’on ne l’avait pas vu venir, voici que Houellebecq, écrivain sous prozac, décortiqueur de nos chairs tristes, glorifie le journal de Jean-Pierre Pernaut. Jean-Pierre Pernaut tellement honnis par l’Intelligentsia qui vilipende son côté populiste franchouillard, Jean-Pierre Pernaut qui fait l’ouverture de son journal sur la météo en Franche-Comté. Le présentateur qui cristallise à lui seul l’image d’un monde étriqué et frileux.
Alors tendance de fond ou juste rééquilibrage des pensées ? Il n’y a pas si longtemps, le futur était notre présent. Il fallait anticiper. Anticiper les tendances, la mode, le prochain prix littéraire, la nouvelle actrice « bankable », changer son téléphone 3G pour un 4G, son ordI par un ipad. Etre le premier à organiser une demolition party, à s’offrir une expérience culinaire dans un restau de World Fusion Food, à galoper dans les steppes du Kazakhstan, bref, être là où il faut être avant tout le monde.
Mais ça c’est tellement 2009 ! En 2010 on renoue avec le gratin dauphinois, on ressort son foulard Hermès et on part en vacances à l’île de Ré. Le brushing est de retour,
Catherine Deneuve en est l’icône gonflée dans « Potiche ». Et surtout on assume. On surfe sur www.nouveau-reac.org. On y croise que du beau monde, Alain Finkielkraut et Jean Baudrillard distillent leurs pensées réac de façon totalement
décomplexée. Eric Brunet, journaliste à France 3 vient de publier « dans la tête d’un réac » où il revendique ses goûts tellement pas dans l’air du
temps : « l’anglophobie, la haine du marketing, une haute idée de la France et le goût de la provocation ».
Provocation, le mot est lâché, et si le réac était le dernier provocateur ? L’Homo Réactus qui prend le contre-pied des bien-pensants ? Celui qui rêve de s’en griller
une au restau sans avoir à sortir sur le trottoir, qui n’a pas envie de manger 5 fruits et légumes par jour, sauf si c’est du raisin et sauf si il vient de Bourgogne, qui n’a pas envie de faire
du sport mais rêve de grandes tablées et de repas qui n’en finissent pas. Comme au bon vieux temps de nos grands-parents. Alors valeur refuge la pensée réactionnaire ? Le terme serait apparu
au cours de la Révolution Française pour qualifier le mouvement qui s’opposait aux changements initiés par les révolutionnaires et prônait le retour à l’ancien régime.
Heureusement qu’à l’époque ils n’avaient pas pignon sur rue, le cours de l’histoire en aurait été quelque peu changé.
Lame de fond ou vaguelette alors la réac attitude ? Préférer Drucker à Taddéi, la tête de veau au risotto, ça fiche un peu la trouille quand même.