Je m’appelle Badou et je vis à Saint-Louis du Sénégal

Par Douxmets

Je m’appelle Badou et je vis à Saint-Louis du Sénégal ; mes frères s’appellent Babacar, Babou, Badara et Bacar ;
Comme mon père et mon grand-père avant lui, je serai pêcheur ; mes frères aussi d’ailleurs, à moins qu’ils ne partent ou alors qu’ils ne construisent nos bateaux ; l’avenir le dira ;

il y a moins de poissons alentour c’est vrai ; d’autant que la population a terriblement augmenté ; et les habitudes de consommation aussi ; les japonais nous  demandent des ailes de requins ; pour les satisfaire, nous sommes obligés de couper les ailerons en pleine mer pour ne pas trop charger les pirogues ;

étrange façon de faire ;

mon arrière grand-père, pêcheur lui aussi se retournerait dans sa tombe ;

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lui qui disait que la mer était notre principal garde-manger ;

le peu de poissons sur nos côtes nous oblige à aller toujours plus loin ; et c’est maintenant vers l’archipel des Bijagos proche de la Guinée-Bissau que nous allons pêcher ; une semaine de mer entassés sur la pirogue… d’ailleurs elles sont plus grandes que celles de nos ancêtres, presque 12 m de long ;

elles sont belles nos pirogues ; très belles même ; la tradition a perduré ;

chaque ethnie a sa façon particulière de travailler le bois ; les pirogues  de mer des Lébous, des N’Yominkas, des Sérères… toujours de la même façon depuis la nuit des temps ; les Lébous par exemple construisent encore des pirogue faite d’une seule pièce de bois, extraite d’un tronc d’arbre, du fromager la plupart du temps ;

les nôtres sont plus lourdes  (environ 900 kg ) car nous allons plus loin  et devons ramener de lourds chargements ; la charge utile est d’à peu près 2500 kg ;

pirogue sénégalaise1 559x369 Je mappelle Badou et je vis à Saint Louis du Sénégal

pirogue sénégalaise

la membrure, en construction navale traditionnelle, est l’assemblage de diverses pièces de bois qui forment le squelette sur lequel le revêtement extérieur sera fixé pour former la coque ; ici, elles sont traditionnellement en gonaquier, gonakié ;

c’est un arbre endémique à nos climats de la famille des mimosas et nous utilisons les gousses et l’écorce pour le tannage des peaux de chèvre ; c’est pour cette raison que vous en voyez en train de sécher au soleil sur les berges du fleuve ;

séchage des peaux tannées au soleil

ensuite on les « colorie » de toute la couleur de l’arc en ciel ; et nous n’oublions jamais les gris-gris qui nous permettrons de revenir sur la terre ferme ; Protection, invocation religieuse, remerciement, recherche de beauté, tout y passe ;

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- dis, Toubab tu aimes regarder ça ?

- viens toubab je t’emmène voir le « petit frère » de mon père ; il sait bien les construire lui…..

Saint-Louis du Sénégal, quartier de Get Ndar