France: faiseurs d’opinions et prescripteurs

Publié le 27 janvier 2011 par Suzanneb

Rester en vie ! 

En santé comme en d'autres domaines:
Nos représentants élus DEVRAIENT NOUS PROTÉGER contre l'appétit des industriels... mais ils préfèrent se remplir les poches !

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2011

Par suzanne

Médiator : et si on parlait des prescripteurs

par ANTOINE EGU, gérontologue hospitalier

19.01.11

L’affaire du benfluorex dont le nom commercial est le Médiator nous apprend que les autorités sanitaires ont été défaillantes, ne sachant contrer l’appétit du gain des firmes de l’industrie du médicament pour d’abord privilégier la santé publique. Nous apprenons aussi que les experts consultés sont bien souvent pris dans des conflits d’intérêts qu’ils sous-déclarent.

Ce que l’on ne dit pas c’est que ces mêmes experts, que les laboratoires pharmaceutiques bichonnent, sont aussi les faiseurs d’opinions que l’on retrouve sur les estrades des congrès médicaux « scientifiques ». Congrès qui en fait sont bien souvent des tribunes de promotion des médicaments. Oui, à propos de ces beaux parleurs, on dit faiseurs d’opinions. Leur discours en direction des médecins se répand ensuite dans la société, auprès du public, auprès de la presse généraliste ou spécialisée cautionnant des produits sans intérêts voir nocifs.

Mais ces faiseurs d’opinions sont aussi ceux qui ouvrent l’hôpital aux visiteurs médicaux, les VRP de l’industrie du médicament. Ceux-ci vont alors inonder de leurs visuels, fiches techniques, vidéos, supports commerciaux et autres objets promotionnels les postes de soins infirmiers et surtout les bureaux des novices de la médecine, à savoir les jeunes étudiants. Ceux-ci submergés par les connaissances à acquérir pour exercer leur futur métier, ne sachant pas toujours à quel saint se vouer, à quelle source s’abreuver de savoir, se font appâter par les laboratoires puis prendre dans la nasse du « prêt-à-penser » qu’ils leur délivrent.

Il faut voir les bureaux des étudiants hospitaliers (alias externes en médecine), dont les murs sont recouverts de publicités industrielles. À ce stade d’apprentissage, on souhaiterait les voir entourer d’un savoir indépendant, impartial. C’est comme la publicité pour les sucreries qu’il est souhaitable d’ôter des programmes télé des petits, et bien en médecine il est éthiquement inacceptable que des esprits encore en formation soient à la merci du discours des laboratoires. Plus tard, lors de leur exercice professionnel ils seront alors d’autant plus perméables aux sirènes des laboratoires et au miel des faiseurs d’opinions.

Que l’on ne vienne pas me dire que leur esprit critique est suffisant ? Même pour les médecins plus âgés, plus mûrs, les preuves scientifiques sont claires que l’intensification des visites médicales au cabinet coïncide toujours avec une augmentation des ventes, cela même sans préjuger de l’efficacité du produit promu ! De toute façon, dans le cas contraire, les laboratoires ne déploieraient pas quelques 20 % de leurs chiffres d’affaires pour la promotion de leurs produits.

Ce que l’on ne dit pas non plus, c’est la responsabilité individuelle des médecins qui ont prescrit le Benfluorex. Cette profession est tenue de se former et de prendre en compte les données de la science les plus récentes. Pourtant, ces données nous disent depuis de nombreuses années que le benfluorex est inutile, et depuis un peu moins longtemps qu’il est dangereux.

Un silence est éloquent à ce sujet c’est celui des représentants de la profession médicale, à savoir les syndicats médicaux et l’ordre des médecins. La raison de ce silence est simple. La profession médicale est une « confrèrerie » à la solidarité exemplaire, mais néfaste, car elle étouffe vite toute remise en cause de son pouvoir et de son savoir.

Comment les médecins qui ne prescrivent pas ces traitements inefficaces qui encombrent les pharmacies et que le gouvernement n’a pas le courage de dérembourser totalement peuvent-ils se faire entendre si les autorités sanitaires ne construisent pas un discours pédagogique en direction du grand public afin d’expliquer que la guérison des affections courantes n’est pas si souvent dépendante des médicaments ? Les Français sont amoureux des médicaments, souhaitons que cette idylle cesse.

Le Monde . fr - Médiator : et si on parlait des prescripteurs - par ANTOINE EGU - gérontologue hospitalier 19.01.11

Il ne suffit pas de déclarer les conflits d’intérêts : il faut les interdire!

En tout, les laboratoires déclarent dépenser 2,8 milliards d’euros en marketing en France -

Les relations entre l’industrie pharmaceutique et les auteurs d’articles médicaux ont toujours existé. Mais, ces dernières années, elles sont devenues de plus en plus intenses, complexes et problématiques. C’est ce qu’écrivait en substance Relman en mai 1984 .

Cela fait donc plus de 26 ans qu’il nous appelait à nous occuper sérieusement de la question des conflits d’intérêt. Je renouvelle ici sa mise en garde et son appel . Avec l’espoir qu’il soit entendu avant 2036 !

Jean-Pierre Lellouche - Conflit d’intérêts au New England journal of Medicine (NEJM)

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Références pour ce billet

  1. Le Monde . fr - Médiator : et si on parlait des prescripteurs - par ANTOINE EGU - gérontologue hospitalier 19.01.11
    http://www.lemonde.fr/idees/chronique/2011/01/20/mediator-et-si-on-parlait-des-prescripteurs_1467930_3232.html
  2. France: Les conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments - Médicament : restaurer la confiance
    http://www.senat.fr/rap/r05-382/r05-38211.html
  3. Pratiques: les cahiers de la médecine utopique
    http://www.pratiques.fr/Conflit-d-interets-au-New-England.html