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POUPOUPIDOU de Gérald Hustache-Mathieu

Publié le 25 janvier 2011 par Celine_diane
POUPOUPIDOU de Gérald Hustache-Mathieu
Poupoupidou, titre faussement allègre- établit d’entrée de jeu l’étreinte mélancolique entre émotions pudiques et rires noirs, traînée d’un bout à l’autre d’un long métrage décalé, drôle, triste, mené sur un ton burlesque hautement réjouissant. A l’instar de cette starlette locale, célébrité à hauteur de la Franche Comté, petite Marilyn Monroe de Mouthe, présentatrice météo au fond fin de la France, rêvant de paillettes et de reconnaissance. La dualité d’un personnage fantôme, femme double (Sophie Quinton, belle, juste) perdue quelque part entre vie et mort, dont l’existence et la fin tragique font écho aux destins des fantasmes américains de l’inconscient collectif, sert de terreau à une histoire atypique qui part du vide pour brasser beaucoup, sortant de nulle part pour s’imposer en agréable surprise, immense film languissant sur la solitude. Avec ce no man’s land frontalier, ce coin où il ne se passe rien, cette page blanche d’un auteur en mal d’inspiration (Jean-Paul Rouve, idéal pour incarner la rupture de ton omniprésente du récit), ces protagonistes au point mort, Poupoupidou débute dans le néant et l’obscurité, pour mieux rejaillir d’un processus de création ludique: le roman policier en construction, le mécanisme d’écriture, tous noués autour du parallèle entre une fille invisible, nouvellement actrice de sa vie, figure féminine notoire, et la lumineuse Monroe- symbole par excellence des icônes déchues, tiraillée entre son rôle d’objet sexuel des foules, et son isolement tragique, seule parmi tous. Une altérité qui puise tout chez Lynch, troublante influence qui parcoure le film: du Song to the siren d’un enterrement jusqu’au prénom Betty, Gérald Hustache-Mathieu (déjà réalisateur du touchant Avril) s’inspire clairement du cinéaste et de sa figure féminine aux deux facettes, Candice/Martine par ses contradictions rappelle sa Renee/Alice de Lost Highway lorsqu’elle est placée au centre des convoitises, la Diane/Camilla de Mulholland Dr. dans ses errances et son mal-être, son entêtement à se sortir de sa condition première pour briller sous les lumières des projecteurs, prête à tout, violemment ambitieuse, tout aussi brutalement privée de ses rêves et espoirs. Le film, lui, par des touches subtiles et une atmosphère tout aussi morose qu’anxiogène, ne ressemble à rien de connu: enquête à la James Ellroy, polar enneigé, mi-drame mi comédie au son de California Dreamin‘. Poupoupidou est une sorte d’inclassable jubilatoire hanté par les spectres de l’Amérique, porté par une héroïne de cinéma grandiose, et dont le cri de détresse, tout plein de spleen et de mordant, conté par cette voix off sombre et enivrante, ne cache rien d’autre que l’énorme besoin d’être aimé. I wanna be loved by you, disait la chanson.
POUPOUPIDOU de Gérald Hustache-Mathieu

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