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SE7EN (David Fincher - 1996)

Par Actarus682

http://www.best-horror-movies.com/image-files/se7en-horror-movie-poster.jpgS'imposant dès sa sortie comme le plus grand thriller jamais réalisé, prenant ainsi la place du déjà excellent Silence des agneaux, le second long-métrage de David Fincher conserve toute sa puissance, tout son impact et toute sa beauté formelle, presque 15 ans après sa sortie.

Conjuguant les talents du scénariste Andrew Kevin Walker, du chef-opérateur Darius Khondji, du compositeur Howard Shore, de comédiens au diapason et de David Fincher, chef d'orchestre de cette symphonie humaine, Se7en parvient à recréer, visionnage après visionnage, le même malaise, et à susciter la même fascination.

A la fois thriller, film d'horreur, drame et étude de moeurs, Se7en s'inscrit comme une tétanisante photographie de l'état du monde, témoignant de sa déliquessence et de sa décrépitude.

Se déroulant dans une ville anonyme (même si un indice récurrent dévoilera assez rapidement où l'on se trouve), l'histoire suit deux inspecteurs de police incarnés par Morgan Freeman et Brad Pitt, sur les traces d'un tueur insaisissable s'inspirant des 7 péchés capitaux pour commettre ses méfaits.

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Baignant dans une atmosphère de fin du monde, le film de  David Fincher constitue un objet formel d'une terrifiante beauté. La pluie, incessante (jusqu'à la scène finale sur laquelle nous reviendrons), la crasse des ruelles et des intérieurs, l'obscurité dévorante, contribuent à dépeindre une humanité qui se délite et dont la descente aux enfers n'est que la conséquence de son propre comportement. "Il est plus facile de voler une chose que de la gagner, de tomber dans la drogue que d'affronter la vie, de battre un enfant que de l'élever. L'amour demande des efforts, du courage". Ce discours capital de l'inspecteur Somerset constatant l'apathie dans laquelle se vautre le monde trouve ainsi sa résonnance dans les décors, les éclairages, l'ambiance poisseuse du film. Une adéquation parfaite de la forme et du fond, que le directeur de la photographie Darius Khondji excelle à établir par le biais d'éclairages extrêmement subtils, faisant évoluer les protagonistes davantage dans l'ombre que dans la lumière.

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Somerset (Morgan Freeman) incarne le témoin désabusé de cette fin du monde annoncée face à son collègue, l'inspecteur Mills (Brad Pitt), personnalité impatiente, électrique, dont la vision de la vie se situe à l'opposé de celle de son partenaire. Refusant d'adhérer au point de vue de Somerset, Mills incarne l'optimisme face au pessimisme affiché de son coéquipier. Ce contraste se verra totalement tranché dans le final apocalyptique du film, qui verra confirmée la position de Somerset, sous un soleil aveuglant. Cette séquence finale (vraisemblablement l'une des plus traumatisantes jamais proposées par un grand film de studio), possède une puissance émotionnelle rare précédée d'un suspense véritablement intenable tandis que les deux policiers accompagnés de l'auteur des crimes roulent dans le désert pour découvrir ensemble l'atroce issue de l'histoire (et de l'humanité). Se déroulant sous un soleil qui brûle littéralement la pellicule, la séquence finale laissera éclater au grand jour toute son atrocité, ne laissant aucune échappatoire aux deux inspecteurs, perdus moralement et physiquement (la scène se passe dans le désert). Le Mal l'emportera, donnant in fine raison à Somerset.

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Incarnant la femme de l'inspecteur MIlls, la sublime Gwyneth Paltrow compose un personnage se situant entre celui de Somerset et celui de Mills. Pas totalement désabusée mais en proie à des questionnements primordiaux déterminant la suite qu'elle souhaite donner à son existence, Tracy ira se confier à l'inspecteur Somerset dans l'une des scènes les plus importantes du film, cette dernière portant en son sein tout le désarroi des deux personnages, ainsi que la douleur qui ronge Sommerset depuis des années à la suite d'une terrible décision qu'il a dû prendre jadis. La séquence, extrêmement émouvante, est l'une des clés du film, de son positionnement par rapport au sort de l'humanité et de son implacable et froide lucidité sur l'état du monde.

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A l'image de l'anonymat de la ville dans laquelle se déroule le film, le nom même du personnage du tueur fait de ce dernier un anonyme. John Doe est en effet le patronyme désignant l'homme de la rue, le quidam, celui qui se fond dans la masse. Ainsi, de la même manière que la ville théâtre de l'action pourrait être la nôtre, le personnage du tueur pourrait être notre voisin. Plus de repères, plus de signes, juste des évènements qui pourraient se dérouler n'importe où, et être perpétrés par n'importe qui. Et pour cause: l'abyme se trouve sous nos pieds à tous. Par ailleurs, la révélation du visage du tueur fut à l'époque de la sortie du film une véritable surprise, l'acteur l'incarnant ayant été quelques mois plus tôt l'inoubliable Keyser Söze de Usual suspects. Kevin Spacey offre ainsi avec John Doe l'une de ses compositions les plus marquantes, incarnant un personnage glacial, machiavélique, intelligent, "et, pire que tout, patient".

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Oeuvre profondément pessimiste, Se7en ne se veut pas pour autant nihiliste. A l'image de la dernière réplique du film prononcée par l'inspecteur Somerset et constituant une faible  lumière dans le chaos ambiant: "Ernest Hemingway once wrote: "The world is a fine place and worth fighting for". I agree with the second part". Cette inoubliable ligne de dialogue constitue aujourd'hui encore une lueur d'espérance dans un monde qui n'est peut-être pas totalement perdu.


  

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